Dans les forêts du Cameroun, un aliment miracle pour la santé des femmes
Quand Caleb Yengo Tata s’est rendu dans la région reculée de Takamanda dans la forêt tropicale humide du Sud-Ouest du Cameroun lors d’une mission scientifique avec le Centre de recherche forestière internationale (CIFOR), il a été frappé par l’ampleur de la malnutrition et de la mortalité infantile. « Nous visitions une communauté un jour et le lendemain, lorsque nous revenions, un autre bébé était décédé », témoigne le chercheur de l’ONG camerounaise Forests, Resources and People qui est partenaire du CIFOR. « Il fallait vraiment que je fasse quelque chose sur le plan de la nutrition. »
C.Y. Tata explique que la population ne mourait pas de faim. Mais la majorité des femmes en âge de procréer souffrait d’anémie due à une carence en fer.
Nous visitions une communauté un jour et le lendemain, lorsque nous revenions, un autre bébé était décédé.
L’anémie est un problème de santé publique au niveau mondial, qui touche gravement les femmes et les enfants en augmentant le risque de mortalité maternelle et infantile, comme de faible poids à la naissance. Cela affecte aussi la santé des enfants à long terme, et peut entraîner malnutrition et pauvreté pour toutes les générations.
Ces dernières années, bien que la faim dans le monde ait régressé, la carence en micronutriments demeure toujours élevée. Dans de nombreuses parties du monde, le régime alimentaire et le style de vie traditionnels évoluent, car l’environnement se dégrade et les sociétés sont de plus en plus interdépendantes. Quelle incidence cette situation a-t-elle sur la consommation de micronutriments par les populations ? C’est une des thématiques étudiées dans le cadre d’un travail de recherche du CIFOR qui se déroule actuellement sur la nutrition, les forêts et les régimes alimentaires.
En 2016, C.Y. Tata revenait à Takamanda pour s’intéresser de près au régime alimentaire et à la santé des femmes en âge de procréer, et explorer si l’accès à la forêt avait une influence sur l’anémie.
« La région de Takamanda est accidentée et difficile d’accès », signale C.Y. Tata – mais c’est un site idéal pour étudier ce problème parce qu’il y a un certain nombre de villages de culture semblable dans deux environnements différents : la savane et la forêt tropicale humide.
Les chercheurs ont trouvé que, si environ 75 % des femmes dans ces deux environnements souffraient d’anémie dans des proportions diverses, celles des communautés de savane présentaient plus que les femmes vivant en forêt une anémie modérée à grave. Ces femmes des communautés forestières consommaient aussi plus de fruits et de légumes riches en vitamine A, laquelle permet entre autres l’absorption du fer et renforce l’immunité.