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Les gouvernements d’Afrique centrale et leurs partenaires de développement représentent une part importante de la demande de bois domestique de la région, principalement pour répondre aux besoins d’infrastructure dans des secteurs tels que l’éducation, les travaux publics et la santé publique. Et cette demande s’accroît au fur et à mesure de la mise en œuvre de projets de développement dans la région. Cependant, les experts affirment que la légalité du bois utilisé pour les projets de développement n’est pas suffisamment prise en compte, ce qui fait que les pays n’ont pas la possibilité de promouvoir une chaîne de production de bois durable et légale pour la consommation nationale.

Une policy brief publiée récemment par l’Observatoire des forêts d’Afrique centrale (Ofac) explique comment, jusqu’à présent, les gouvernements et les organisations internationales dans la région n’incluent pas de clause de légalité dans leurs appels d’offres pour les marchés publics.

« Dans l’état actuel des choses, les États et les acteurs du développement contribuent indirectement aux pratiques informelles et illégales qui prévalent dans le secteur du bois en Afrique centrale », a déclaré Richard Eba’a Atyi, auteur principal de la policy brief et directeur du Centre pour la recherche forestière internationale (CIFOR) en Afrique centrale. « Les différents acteurs de la chaîne d’approvisionnement des marchés publics violent les engagements des pays à l’égard de processus tels que le plan d’action FLEGT et l’accord sous-régional de contrôle forestier de 2008 en Afrique centrale ».

Dans la policy brief, Eba’a Atyi et les autres auteurs appellent à un changement des politiques nationales en matière des marchés publics dans la région pour imposer des achats publics de bois provenant de sources légales.

EFFECTUER DES CHANGEMENTS 

Actuellement, les marchés publics de bois suivent une certaine séquence d’événements. Les gouvernements nationaux mènent des projets d’infrastructure, souvent avec le soutien de bailleurs internationaux, et attribuent des projets via des appels d’offres publics à des entreprises nationales ou internationales qui réalisent ensuite les travaux de construction. La plupart de ces entreprises s’approvisionnent en bois auprès des marchés urbains locaux fournis par de petits exploitants forestiers, qui ne prennent pas en compte les taux de renouvellement des ressources. La chaîne d’approvisionnement est donc informelle – et essentiellement illégale – et contribue à la détérioration et à l’épuisement des forêts d’Afrique centrale.

Les bailleurs internationaux, dans la plupart des cas, respectent les lois nationales, ce qui signifie qu’ils n’ont pas à s’assurer que le bois provient légalement des projets de marchés publics. Bien que certaines entreprises et certains bailleurs disposent de directives opérationnelles internes recommandant l’utilisation de bois provenant de sources légales dans leurs projets, la plupart du temps, ces directives ne sont ni suivies ni mises en œuvre.

En outre, le bois certifié ou d’origine légale est souvent difficile à trouver en Afrique centrale, soit parce que l’industrie ne s’intéresse pas aux marchés nationaux à faible profit, soit parce qu’elle est incapable de répondre à la demande nationale.

Cependant, les attitudes changent lentement et les gouvernements et les acteurs du développement se tournent de plus en plus vers le problème. « Quelques initiatives prises en Afrique centrale indiquent que les pays sont prêts à promouvoir le bois d’origine légale dans les marchés publics », explique Guillaume Lescuyer, collaborateur de la policy brief et coordinateur du projet ESSOR du CIFOR visant à augmenter la demande de bois légal au Cameroun . « Le ministère camerounais des Forêts et de la Faune (MINFOF), par exemple, a formé un groupe de travail sur la question et prépare actuellement un projet de texte sur la promotion du bois d’origine légale dans les contrats gouvernementaux ». Considérant que la demande de bois du gouvernement camerounais est estimée à au moins 13 000 mètres cubes par an, cette mesure peut potentiellement avoir un impact très important sur l’amélioration de l’industrie.

EFFORTS JURIDIQUES

D’autres initiatives dans la région peuvent être trouvées au Gabon et en République démocratique du Congo (RDC). « Au Gabon en 2016, par exemple, le ministère de l’Education nationale a cherché à démontrer la qualité du bois gabonais en achetant 150 000 tables et bancs d’origine supposée légale provenant du Gabon Wood Hub », souligne Eba’a Atyi. « En RDC, la faculté des sciences de l’université de Kisangani a récemment obtenu du bois certifié pour un projet d’infrastructure avec le soutien financier de l’Union européennee ».

Ces initiatives individuelles, bien que relativement limitées, contribuent à sensibiliser le public à la question et doivent être encouragées et étendues dans d’autres pays, affirment les experts.

Pour exiger du bois d’origine légale dans les contrats publics, les auteurs de la policy brief proposent trois options aux gouvernements de la région. Premièrement, ils devraient faire une déclaration politique annonçant leur intention de promouvoir l’utilisation exclusive de bois provenant de sources légales dans les contrats gouvernementaux. Deuxièmement, ils devraient publier un acte juridique – un décret contraignant, par exemple, signé par un président ou un premier ministre, ou une ordonnance conjointe des agences nationales impliquées dans la gestion des ressources forestières, les marchés publics et les infrastructures – sur la légalité du bois dans les marchés publics. Et troisièmement, ils devraient inclure une clause sur l’utilisation du bois provenant de sources légales dans les codes des marchés publics, de manière à cibler directement les mandats des fournisseurs.

Enfin, la cooperation régionale, particulièrement à travers la Commission des forêts d’Afrique centrale (Comifac), aussi représente une opportunité de promouvoir des changements dans les politiques sur les marchés publics au niveau intergouvernemental.

« Compte tenu de la mise en œuvre  de l’accord de partenariat volontaire (APV), et l’intérêt croissant pour la promotion du commerce intra-africain, les États membres de la Comifac devraient prioriser la preparation et adoption des nouvelles politiques des marchés publics », dit Eba’a Atyi. Et les partenaires internationaux, dit-il, devraient aider à préparer ces politiques et à les appliquer à leurs actions de développement en Afrique centrale.

Pour plus d'informations sur ce sujet, veuillez contacter Richard Eba'a Atyi à l'adresse courriel suivante r.atyi@cgiar.org.
Cette recherche a été possible grâce à l'aide financière RIOFAC, avec l'appui financier de l'Union européenne
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