LIMA, Pérou – Le changement climatique « mine » les nombreux progrès réalisés dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), selon la plus haute représentante du développement à l’ONU, qui ajoute que les paysages durables sont essentiels pour l’atténuation du changement climatique, l’adaptation et le développement durable en général.
« Il est donc encourageant de constater que des éléments clés des paysages durables figurent parmi les 17 objectifs et 169 cibles proposées par le Groupe de travail ouvert sur les objectifs de développement durable de l’Assemblée Générale », affirme Helen Clark, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). « Cela comprend la protection, la restauration, et l’utilisation durable d’écosystèmes terrestres ; la gestion durable des forêts, enrayer la dégradation des sols, et stopper la perte de biodiversité. »
Alors qu’elle s’exprimait devant plus de 1700 participants au Forum mondial sur les paysages – organisé par le Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR) en marge des discussions de l’ONU sur le climat à Lima – Mme Clark a appelé les pays forestiers en développement à faire davantage d’efforts pour atténuer le changement climatique et réduire la déforestation, notamment par des réformes d’aménagement du territoire. « Il faudra pour cela une volonté politique et un leadership solide, et la communauté internationale dans son ensemble doit soutenir ces efforts », a-t-elle dit.
Mais Mme Clark a aussi poussé les économies avancées à agir en faveur des incitations à grande échelle pour la protection de la forêt. « 2014 a été l’année durant laquelle de nombreux acteurs du secteur privé se sont levés pour lutter contre la déforestation. 2015 devra être l’année au cours de laquelle les gouvernements se lèvent pour honorer les promesses de la REDD+, pour laquelle ils ont travaillé si dur ces sept dernières années. », a-t-elle déclaré.
Mme Clark a aussi appelé le secteur privé à éliminer la déforestation de leurs chaînes d’approvisionnement « sans tarder ».
Transcription du discours d’Helen Clark :
Je remercie les organisateurs du Forum mondial sur les paysages – le Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR), le PNUE, la FAO et les ministères de l’Environnement et de l’Agriculture du Pérou – de m’avoir invitée à intervenir ce matin.
L’objet de ce Forum est très pertinent pour l’effort mondial d’enrayement du changement climatique, et pour atteindre un développement durable de manière générale.
Le monde a été témoin de progrès importants sur les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) lancés au début du siècle, notamment sur des cibles environnementales fixées par les OMD.
L’objectif consistant à réduire de moitié la pauvreté a été atteint avec cinq ans d’avance sur l’agenda; en moyenne à travers le monde, l’égalité des sexes a été atteinte dans l’éducation primaire et la plupart des enfants s’inscrivent maintenant dans une école primaire; et les taux de mortalité infanto-juvénile ont sérieusement baissé. Il y a eu des avancées dans la lutte contre le SIDA, le paludisme et la tuberculose.
Sur l’OMD7, qui vise à assurer un développement durable, objectif consistant à réduire de moitié le nombre de personnes privées d’accès à des ressources en eau améliorée a été atteint avec cinq ans d’avance sur l’agenda. L’étendue des zones protégées augmente – elle représente maintenant 14,6% des zones terrestres et 9,7% des zones côtières marines mondiales. Cela contribue à sauvegarder la biodiversité et les services essentiels fournis par les écosystèmes naturels de notre planète. De plus, depuis l’adoption du Protocole de Montréal, la consommation de substances qui appauvrissent la couche d’ozone a été réduite de 98%. Les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables sont davantage exposées aux sécheresses plus fréquentes et plus graves et aux violentes tempêtes auxquelles notre planète est confrontée
Pourtant, le changement climatique mine les avancées réalisées: les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables sont davantage exposées aux sécheresses plus fréquentes et plus graves, et aux violentes tempêtes auxquelles notre planète est confrontée.
Alors qu’environ un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre proviennent de l’agriculture, la foresterie et l’élevage, il est essentiel pour l’atténuation du changement climatique de parvenir à des paysages durables.
Les paysages durables sont aussi essentiels pour l’adaptation au changement climatique et pour le développement durable en général, car ils sauvegardent et fournissent une vaste série de bénéfices sociaux, culturels, environnementaux et économiques – comme l’eau et l’énergie qui soutiennent la sécurité alimentaire.
Il est donc encourageant de constater que des éléments clés des paysages durables figurent parmi les 17 objectifs et 169 cibles proposées par le Groupe de travail ouvert sur les objectifs de développement durable de l’Assemblée Générale. Cela comprend la protection, la restauration, et l’utilisation durable d’écosystèmes terrestres; la gestion durable des forêts, enrayer la dégradation des sols, et stopper la perte de biodiversité.
Lors du Sommet sur le climat de New York organisé par le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon en septembre, l’agriculture durable et la protection des forêts ont été reconnus comme éléments essentiels de la lutte contre le changement climatique. Le message était clair: sans action décisive sur l’utilisation des terres, via une agriculture durable ainsi que des efforts pour faire chuter la déforestation et restaurer les forêts, le réchauffement climatique ne se limitera pas à 2 degrés.
La bonne nouvelle, c’est qu’une série d’acteurs se sont rassemblés lors du Sommet sur le climat de septembre pour soutenir la Déclaration de New York sur les Forêts, et pour prendre des engagements précis et ambitieux en faveur d’actions pour la protection des forêts.
J’aimerais remercier Paul Polman, le PDG d’Unilever, et les autres dirigeants du secteur privé, dont le leadership sur l’utilisation des terres et des forêts a permis de changer la donne dans ce domaine.
La Déclaration de New York sur les Forêts a été applaudie comme «un résultat clé du Sommet sur le climat». 175 entités, dont des pays en développement et développés, des états et des provinces, de grandes entreprises, des chefs indigènes, et des organisations de la société civile se sont engagées à réduire de moitié la déforestation d’ici 2020, et d’y mettre fin en 2030. Elles se sont aussi engagées à restaurer 350 millions d’hectares de forêts – une zone qui équivaut plus ou moins à la taille de l’Inde. Les gouvernements qui ont approuvé la Déclaration se sont engagés à «Soutenir et aider le secteur privé à atteindre son objectif d’éliminer la déforestation de la production de marchandises agricoles comme l’huile de palme, le soja, le papier et le bœuf pas plus tard qu’en 2020, reconnaissant que de nombreuses entreprises ont même des objectifs plus ambitieux.»
Si les engagement pris dans la Déclaration sont tenus, cela permettrait de réduire les émissions d’autant que si on enlevait toutes les voitures qui se trouvent actuellement sur les routes du monde.
L’année dernière, de nombreux pays forestiers ont fait des progrès considérables dans le développement et l’application de leurs stratégies forestières, et leurs actions sont de plus en plus soutenues par la finance internationale. De plus, des participants à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) ont conclu le Cadre de Varsovie pour la REDD+, et plus de 50 grandes entreprises ont pris des engagements importants pour éliminer la déforestation de leurs chaînes d’approvisionnement. Si les engagement pris lors de la Déclaration de New York sur les forêts sont tenus, cela permettra de réduire les émissions d'autant que si on enlevait toutes les voitures qui se trouvent actuellement sur les routes du monde
Lors du Sommet sur le climat, des dirigeants de nombreux secteurs ont poursuivi ces progrès en présentant des engagements individuels et collectifs pour favoriser le changement.
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Les dirigeants du secteur privé ont défini comment leur secteur peut contribuer à stopper la déforestation, et ce qui pourrait les aider à y arriver. Les entreprises ont pris des engagements nouveaux et plus larges pour des chaînes d’approvisionnement exemptes de déforestation.
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Les pays forestiers se sont engagés à réduire la déforestation et/ou à restaurer les terres dégradées.
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Un certain nombre de pays donateurs ont affirmé leur soutien pour l’inclusion de la REDD+ dans un nouvel accord mondial sur le changement climatique, qui devrait entrer en vigueur en 2020. L’Allemagne, la Norvège, et le Royaume-Uni se sont engagés ensemble à renforcer les financements REDD+ basés sur les résultats, à commencer par le financement de 20 grands nouveaux programmes d’ici 2016.
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De nombreux de pays qui importent beaucoup de marchandises forestières se sont engagés à mettre en place de nouvelles règles d’achat, qui encouragent les chaînes d’approvisionnement exemptes de déforestation.
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Le Groupe de travail des gouverneurs sur le climat et les forêts, qui rassemble 26 états et provinces sur un quart de l’ensemble des forêts tropicales, s’est engagé à réduire la déforestation dans les juridictions de 80% d’ici 2020, à condition d’être encouragé par un système de paiement basé sur les résultats à grande échelle. Lors du sommet, le rôle primordial des peuples indigènes dans la protection des forêts a été pleinement reconnu. Une coalition mondiale de peuples indigènes s’est engagée à peser sur la protection de centaines de millions d’hectares de forêts tropicales à travers l’Amazonie, le Bassin du Congo, l’Indonésie et la Mésoamérique au service de l’atténuation et l’adaptation climatique.
Les pays forestiers en développement peuvent présenter des contributions nationales à l'atténuation qui incluent des objectifs et des politiques ambitieux pour réduire déforestation
Alors qu’il reste encore beaucoup à faire, les nombreux témoignages d’actions et de coopérations pour les forêts au Sommet sur le climat sont encourageants. L’esprit de partenariat, démontré par l’obtention de la Déclaration de New York sur les forêts, augure des progrès continus, et il doit être nourri pour que nos forêts survivent.
Les progrès réalisés cette année permettent de voir clairement les chemins à suivre sur les questions forestières, entre aujourd’hui et la Conférence des parties à la CCNUCC l’an prochain à Paris:
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Les pays forestiers en développement peuvent présenter des contributions nationales à l’atténuation qui incluent des objectifs et des politiques ambitieux pour réduire déforestation et accroître la reforestation. Ils pourraient évaluer ce qu’ils pourraient réaliser unilatéralement, et ce qu’ils pourraient faire de plus avec l’aide internationale. Ils devraient continuer à mettre en œuvre et à faire respecter les réformes territoriales qui leur permettront de se développer sans détruire les forêts. Cela requerra une volonté politique et un leadership solides, et la communauté internationale dans son ensemble doit appuyer ces efforts.
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Les économies avancées doivent apporter des incitations économiques à grande échelle pour la protection des forêts, en particulier via la REDD+, dans le cadre du nouvel accord climat. 2014 a été l’année durant laquelle de nombreux acteurs du secteur privé se sont levés pour lutter contre la déforestation. 2015 devra être l’année au cours de laquelle les gouvernements se lèvent pour honorer les promesses de la REDD+, pour laquelle ils ont travaillé si dur ces sept dernières années.
Le secteur privé doit éliminer la déforestation de ses chaînes d'approvisionnement sans tarder
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Le secteur privé doit éliminer la déforestation de ses chaînes d’approvisionnement sans tarder. Cela signifie qu’il faut étendre les engagements existants pour la durabilité afin de toucher un large éventail de produits, et inviter plus d’entreprises, dans les pays développés et en développement, à nous rejoindre.
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On doit donner plus de pouvoir aux peuples indigènes pour qu’ils continuent de jouer leur rôle vital dans la protection des forêts. Les gouvernements doivent officialiser et protéger leurs droits, et le secteur privé doit respecter leurs droits à donner ou à refuser librement leur consentement préalable et éclairé.
L’organisation de l’ONU s’est profondément engagée pour construire sur les progrès de l’année dernière et avancer sur les questions forestières et paysagères – en particulier via ses mandats d’aide aux pays en développement.
Au PNUD, nous travaillons étroitement avec nos partenaires de l’ONU au sein du Programme ONU-REDD, avec la FAO, le PNUE mais aussi avec la Banque mondiale et le Fonds pour l’environnement mondial. Nous continuerons à travailler avec Paul Polman et d’autres dirigeants dans la puissante coalition multi-sectorielle qui s’est formée pour le Sommet sur le climat. Nous voulons aider à construire sur l’élan créé par la Déclaration de New York sur les forêts, et porter les partenariats forts autour d’elle jusqu’à la COP de Paris et au-delà.
Pour conclure, j’aimerais souligner ce que nous savons tous: un changement climatique de 2 degrés est impossible sans réels progrès sur les paysages durables, dont les forêts.
La coopération et l’engagement d’acteurs clés représentés ici à ce Forum est aussi primordiale pour le succès. Au PNUD, nous sommes ravis d’être votre partenaire dans ce voyage.
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