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Pensez à l’inégalité homme-femme quand vous parlez climat

On oublie souvent l'impact du changement climatique sur l'égalité des sexes.
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LIMA, Pérou — Lors d’une séance sur le genre au Forum mondial sur les paysages, en marge de la conférence annuelle sur le changement climatique de la CCNUCC à Lima au Pérou, les scientifiques et les dirigeants autochtones ont souligné la nécessité de tenir compte du fait que le changement climatique pourrait affecter les hommes et les femmes différemment. Ils recommandent d’inclure la thématique du genre dans les études sur l’adaptation au changement climatique et sur son atténuation.

« Les relations de pouvoir déterminent les expériences, l’éducation et les opportunités. De ce fait, les impacts du changement climatique seront inégalement répartis », a expliqué Eleanor Blomstrom de l’Organisation des Femmes pour l’Environnement et le Développement (WEDO) à l’auditoire. 

Nous avons besoin de plus d'informations : comment le changement climatique affecte-t-il les femmes, comment les femmes sont-elles exclues de la prise de décisions et quelle est la place du leadership féminin dans ce type de prise de décision

Eleanor Blomstrom

Les structures de pouvoir entre les sexes ont des conséquences pour les villages ruraux – et pour les négociations internationales.

Selon elle, il existe un fort déséquilibre entre les sexes au sein même de la CCNUCC. Le conseil du Fonds Vert pour le Climat est, par exemple, constitué de 21 hommes et 3 femmes. Dans tous les autres conseils et organismes de la CCNUCC les hommes sont également beaucoup plus nombreux que les femmes.

« Nous avons besoin de plus d’informations : comment le changement climatique affecte-t-il les femmes, comment les femmes sont-elles exclues de la prise de décisions et quelle est la place du leadership féminin dans ce type de prise de décision », déclare Mme Blomstrom.

Claudia Ringler, directeur adjoint de la Division de l’Environnement et de la Technologie de Production à l’Institut International de Recherche sur les Politiques Alimentaires (IFPRI), a partagé une nouvelle étude sur les petites exploitantes agricoles et leur capacité à s’adapter au changement climatique.


Regardez l’intégralité de cette session

  • Cliquez ici pour voir un enregistrement de cette session du Forum mondial sur les paysages.
  • Pour plus de nouvelles, d’études et d’analyses liées à la COP20 et au Forum mondial sur les paysages : forestsnews.cifor.org/lima

GENRE ET ADAPTATION

L’étude de l’IFPRI a examiné les différents impacts du changement climatique par rapport aux sexes, ainsi que les possibilités d’adaptation de certaines communautés au Bangladesh, en Éthiopie, au Kenya et au Mali, explique Mme Ringler.

« Nous avons constaté un écart net entre les sexes touchant des actifs tangibles et intangibles », dit-elle.

« Les hommes sont affectés de manière plus directe par le changement climatique. Néanmoins, les actifs des femmes, souvent plus petits et liquides tels que des bijoux, sont plus facilement cédés en cas de choc climatique. »

Ils ont constaté que les femmes sont moins bien équipées pour ajuster leurs pratiques agricoles au changement climatique. 

Les informations sur le changement climatique sont de plus en plus complexes. Si les femmes ne disposent pas de voies officielles pour obtenir des informations, elles ne s’apercevront pas qu'il y a un problème

Claudia Ringler

« Les femmes ont moins accès aux technologies agricoles qui pourraient les aider à s’adapter au changement climatique », dit-elle.

« Au Mali, les hommes sont en mesure de compenser les déficits de production grâce à l’accès à l’irrigation – les femmes ne disposent pas de cet accès et ne peuvent donc pas combler les déficits. »

« Les hommes utilisent la meilleure technologie dont ils disposent; les femmes utilisent la houe. »

Quant aux connaissances, il existe également de grandes différences entre hommes et femmes, dit-elle. Grâce aux réseaux sociaux, les hommes au Mali sont plus susceptibles de recevoir des informations sur des stratégies d’adaptation au changement climatique.

« Les informations sur le changement climatique sont de plus en plus complexes. Si les femmes ne disposent pas de voies officielles pour obtenir des informations, elles ne s’apercevront pas qu’il y a un problème. »

Au Kenya, ils ont remarqué que les femmes sont moins susceptibles de connaître les techniques agricoles intelligentes face au climat – cependant celles qui les connaissent sont tout aussi susceptibles que les hommes d’adopter ces méthodes.

« Cela signifie que nous devons cibler plus directement les femmes avec les informations relatives au climat », déclare Mme Ringler.

« Nous devons construire une éducation pour les femmes de manière proactive afin d’augmenter leur résilience face au changement climatique et de développer leur plein potentiel. »

GENRE ET ATTÉNUATION

Lorsqu’il s’agit d’atténuation du changement climatique, les enjeux liés au genre ont reçu encore moins d’attention, selon la table ronde.

Dix décisions de la CCNUCC sur l’adaptation ont abordé le genre; contre seulement trois sur l’atténuation.

Le genre est pertinent puisque toute politique qui entreprend de changer les règles d'utilisation des terres et des forêts est susceptible d'affecter autant les femmes que les hommes

Anne Larson

Lors de l’examen de la REDD + – un régime visant à atténuer le changement climatique en réduisant les émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts – il est crucial que les scientifiques et les personnes qui mettent en œuvre les initiatives considèrent le genre, selon Anne Larson, directeur de chercheur au Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR).

« Le genre est pertinent puisque toute politique qui entreprend de changer les règles d’utilisation des terres et des forêts est susceptible d’affecter autant les femmes que les hommes et, en fonction de la division du travail, ils peuvent être affectés différemment », dit-elle.

« Lorsque vous parlez des actions et des stratégies visant à changer l’utilisation des forêts, vous devez penser à ce que vous demandez aux personnes de faire. »

« Est-ce que vous leur demandez d’arrêter la pratique de l’agriculture itinérante, ou de produire sur des surfaces plus petites ? Et si oui, qui va être affecté ? Les activités sont-elles effectuées par des femmes ou par des hommes ? Voici quelques-unes des questions liées au genre qui doivent être posées. »

C’est ce qu’ont fait Mme Larson et d’autres chercheurs du CIFOR.

L’étude comparative mondiale sur la REDD+ a examiné des questions liées au genre dans le cadre de son évaluation de 23 initiatives pilotes de REDD+ dans six pays à travers des tropiques.

Ils ont mené des groupes de discussion exclusivement pour femmes, ainsi que des consultations mixtes de village où environ 66% étaient des hommes.

Les résultats de 20 projets initiaux de REDD+ dans 77 villages indiquent que, lorsque les réponses sont comparées entre les groupes de discussion mixtes et ceux composés uniquement de femmes, les groupes de femmes sont nettement moins bien informés sur les interventions des projets de REDD+.

41% des femmes du groupe avaient une compréhension de base de la REDD+, contre 67% dans le groupe mixte.

« Cette différence n’est pas très surprenante », déclare Mme Larson.

Même dans les communautés où les femmes jouent un rôle actif – où elles tiennent des postes de direction et où elles ont l’impression d’avoir une influence sur les décisions du village – elles savent moins sur REDD+ que les hommes.

De même, dans les communautés où il est apparu que l’utilisation de la forêt par les hommes et par les femmes est plus ou moins égale, ou même où les femmes utilisent la forêt plus que les hommes: « Nous n’avons toujours pas vu de différence – il y a toujours ce grand écart de la connaissance des femmes sur la REDD+ », déclare Mme Larson.

« On s’attend à ce que ces femmes soient très intéressées par les forêts, et pourtant elles ne sont pas autant informées que les hommes de leurs propres communautés», dit-elle. « Nous avons seulement pu constater une diminution de cet écart dans les communautés où les femmes jouent un rôle important dans l’établissement des règles liées aux forêts. »

Cela signifie que les interventions, telles que la REDD+, qui affectent la façon dont les membres de communautés peuvent utiliser les ressources forestières, doivent prendre au sérieux ces inégalités.

« Si nous n’adoptons pas une approche qui tient compte du genre, nous pourrions faire plus de mal que de bien aux femmes », averti Mme Larson.

« En ce qui concerne la REDD+, si le statu quo est inéquitable, alors les interventions qui ne comprennent et ne répondent pas à ces inégalités dès le début sont vouées à les perpétuer. »

Pour plus d’informations sur ce sujet, veuillez contacter Anne Larson sur a.larson@cgiar.org.

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