BOGOR, Indonésie — C’est un moment propice pour l’adaptation au changement climatique.
Les négociations sur le climat à Bonn en juin semblaient ouvrir la porte à des liens officiels entre les stratégies d’adaptation et les mesures d’atténuation du changement climatique. Un nombre croissant de preuves montre que relier ces deux méthodes est essentiel à la réussite de chacune d’entre elles.
S’ajoute à cela une nouvelle étude au Cameroun. Dans un article publié plus tôt cette année, des chercheurs de ce pays d’Afrique centrale ont montré que les efforts visant à atténuer le réchauffement climatique, en luttant contre la déforestation, ne peuvent plus être menés séparément des mesures visant à aider les populations à s’adapter à un degré de changement climatique inévitable.
«Nous voulions démontrer en pratique que l’adaptation peut être reliée à l’atténuation, commençant par le niveau d’activité», déclare le scientifique Eugene Loh Chia, chercheur au Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR) et auteur principal de l’étude, «Liens forêt-climat: lier l’adaptation et l’atténuation dans le processus de politique climatique du Cameroun».
L’étude s’est inspirée des observations faites par deux projets communautaires de préservation du carbone forestier dans le sud du Cameroun, mis en œuvre par le Centre pour l’Environnement et le Développement (CED), ainsi que les résultats du projet de recherche «Forêts du Bassin du Congo et Adaptation au Changement Climatique» (CoFCCA) du CIFOR. Ne pas inclure l'adaptation dans un projet impliquant des pratiques agricoles ne sera jamais durable
Puisque le changement climatique affecte les conditions météorologiques, les saisons agricoles et la production agricole, les experts prévoient que les agriculteurs seront obligés d’étendre les zones arables, y compris par la déforestation dans des zones tropicales, telles que les deux communautés étudiées dans le document sur le Cameroun. Ceci compromettrait la mise en œuvre de projets d’atténuation, par lesquels la population locale est payée pour protéger les arbres de la déforestation, contribuant ainsi à la réduction d’émissions de gaz à effet de serre.
«Au Cameroun, la réduction d’émissions de gaz à effet de serre issues de la déforestation et de la dégradation des forêts (REDD+) domine les actions concernant le changement climatique, mais nous avons démontré la nécessité d’ajouter l’adaptation comme avantage supplémentaire pour ces programmes d’atténuation», déclare Denis Sonwa, chercheur chevronné du CIFOR et co-auteur de la publication, qui a également travaillé sur le projet CoFCCA.
Les chercheurs ont examiné les activités menées dans la cadre des projets du CED et ont constaté que beaucoup d’entre eux contribuent à l’adaptation et l’atténuation. Par exemple, l’amélioration des pratiques agricoles -y compris l’agroforesterie- aide les communautés à renforcer leurs moyens de subsistance dans le contexte du changement climatique, tout en réduisant l’impact de l’agriculture sur la forêt.
«Ne pas inclure l’adaptation dans un projet impliquant des pratiques agricoles ne sera jamais durable», déclare M. Sonwa. «Nous espérons que démontrer les avantages qui découlent de l’intégration de l’adaptation et de l’atténuation au niveau local pourra influencer l’élaboration de politiques au niveau national.»
Les chercheurs déclarent que l’État devrait jouer un rôle crucial dans l’adoption de telles politiques intégrées, pour les défendre lors des négociations internationales sur la coopération mondiale afin de lutter contre le changement climatique. «Nous devons faire en sorte que les cadres théoriques, utilisés pour attribuer un financement international, ne détruisent pas les possibilités d’intégration entre l’atténuation et l’adaptation», déclare M. Sonwa.
DES DIFFICULTÉS PERSISTENT
Le document identifie plusieurs défis posés par la promotion de telles politiques intégrées. Les institutions du Cameroun sont actuellement divisées quant à leur approche de l’action climatique; l’adaptation et l’atténuation traversent de multiples intérêts sectoriels, qui sont souvent déconnectés, et les enjeux sous-jacents essentiels tels que l’insécurité foncière ne sont toujours pas résolus. Bien que les programmes communautaires de préservation du carbone examinés avaient des co-bénéfices liés à l’adaptation, «le promoteur du projet, CED, avait peu ou pas de savoir-faire technique pour mettre en œuvre et contrôler les différentes activités», selon les chercheurs. La coordination entre le différents experts, nécessaires pour mener efficacement les activités, était insuffisante. Toute activité de lutte contre la déforestation doit renforcer leurs moyens et leur fournir des ressources
Pour surmonter ces obstacles, les chercheurs recommandent une participation plus forte de la part des communautés locales ainsi que des équipes multi-institutionnelles et multidisciplinaires. Ils recommandent également que les stratégies et activités d’adaptation et d’atténuation considèrent le double objectif de réduire la vulnérabilité au changement climatique et les émissions de gaz effet de serre.
Le document souligne qu’à chaque fois que l’atténuation et l’adaptation ont lieu en parallèle, ce sont les populations locales qui le rendent possible.
« Quant à l’atténuation, ce sont les communautés locales qui surveillent si le stock de carbone forestier augmente ou diminue », explique M. Chia.
« D’un autre côté, ces mêmes personnes dépendent de la forêt. Toute activité de lutte contre la déforestation doit renforcer leurs moyens et leur fournir des ressources. »
Pour plus d’informations sur les sujets de cette recherche, veuillez contacter Denis Sonwa sur d.sonwa@cgiar.org.
Cette recherche s’inscrit dans le cadre du Programme de recherche du CGIAR sur les Forêts, les Arbres et l’Agroforesterie.
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