Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ? J’étais à Bali (Indonésie) à la première conférence ministérielle de l’initiative pour l’amélioration de la gouvernance et l’application des lois dans le secteur forestier (mieux connue sous l’acronyme anglo-saxon FLEG, Forest Law Enforcement and Governance). Depuis son lancement en Asie, ce processus FLEG a été étendu à d’autres régions et a focalisé l’attention internationale contre l’exploitation et le commerce illégal des bois. Comme ces activités illégales dérobent aux gouvernements une part non négligeable de leurs ressources (fiscales ou douanières) qu’ils pourraient allouer au développement, les institutions qui luttent contre la pauvreté préconisent l’application des lois forestières comme une stratégie de réduction de la pauvreté.
Cinq ans plus tard, Marcus Colchester et ses collègues viennent de publier une revue sur l’impact de la mise en œuvre des lois sur les moyens d’existence des populations rurales : « Justice in the Forest: Rural Livelihoods and Forest Law Enforcement » qui synthétise les résultats de plusieurs études de cas (Bolivie, Honduras, Nicaragua, Cameroun, Indonésie et Canada). Les conclusions sont étonnamment similaires malgré les contextes nationaux très divers.
Les lois forestières tendent à rendre illégales les sources de revenu des populations les plus pauvres ou à imposer des demandes administratives onéreuses aux « petits » utilisateurs de la forêt. Les populations forestières pauvres se retrouvent de facto souvent prises au piège de réseaux criminels plus vastes. Comme ces réseaux illégaux sont étroitement liés aux politiques locaux, les éventuelles opérations de contrôle ont plus de chance de cibler les petits joueurs que les opérateurs les plus puissants. Il en résulte que l’application « aveugle » de la loi a tendance à renforcer les injustices présentes au lieu de promouvoir les intérêts des plus défavorisés.
Les règlementations extra-sectorielles qui protègent les droits des communautés sont souvent faibles, ambigües ou simplement ignorées. Les réformes législatives progressistes – qui reconnaissent les droits des peuples indigènes et des communautés sur les ressources forestières – ont essentiellement eu lieu en réponse à une forte mobilisation sociale et à une demande de gouvernance forestière plus juste.
Les initiatives en faveur des populations les plus défavorisées devraient mettre plus l’accent sur le renforcement des groupes qui peuvent effectivement créer une telle demande, considérer l’étendue du système légal (et pas seulement les aspects sectoriels) et reconnaître les conséquences négatives imprévues qui peuvent résulter d’une approche trop étroite de la mise en œuvre des législations forestières.
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La référence complète du document est : Colchester, M.; Boscolo, M.; Contreras-Hermosilla, A.; Gatto, F.D.; Dempsey, J.; Lescuyer, G.; Obidzinski, K.; Pommier, D.; Richards, M.; Sembiring, S.S.; Tacconi, L.; Rios, M.T.S.; Wells, A. 2006. Justice in the forest: rural livelihoods and forest law enforcement. Forest Perspectives 3, CIFOR, Bogor, Indonesia.