Depuis quelques années, Dick Rice et ses collègues du Center for Applied Biodiversity Science de Conservation International ont généré une importante controverse en considérant qu’essayer de rendre plus durables les opérations d’exploitation forestière n’aide pas vraiment à la conservation des forêts. Leur dernier papier, « Sustainable Forest Management : A Review of the Conventional Wisdom » (Gestion forestière durable : une réévaluation de « la sagesse conventionnelle » ), présente intelligemment leur argumentaire.
Les auteurs proclament que les bailleurs de fond ont peu à montrer pour les centaines de millions de dollars qu’ils ont investi dans la promotion de la gestion forestière durable. Ceci est dû à ce que les sociétés d’exploitation considèrent beaucoup profitables les pratiques d’exploitation non durables et que les gouvernements ont bien du mal à les forcer à gérer leurs forêts de façon durable. Des forêts naturelles qui poussent lentement, le prix du bois qui augmente à peine plus vite que l’inflation et des taux d’intérêts élevés dans la plupart des pays tropicaux sont autant de freins aux investissements sur le long terme. Dans un tel contexte, économiquement, l’investissement sur le long terme n’a pas de sens. Les auteurs reconnaissent que les techniques d’exploitation à impact réduit peuvent augmenter les bénéfices des sociétés en rendant les opérations plus efficaces, grâce à un meilleur planning. Ils considèrent néanmoins que ces pratiques seules ont peu de chance de rendre l’exploitation durable.
D’après Rice et al., la plupart des politiques censées rendre l’exploitation plus durable vont simplement encourager plus d’exploitation conventionnelle. Cela inclus les politiques pensées afin de rendre l’exploitation et la transformation plus efficaces, de créer des marchés pour les essences secondaires, d’assurer la sécurité foncière des concessions et de promouvoir la transformation locale.
Bien que les auteurs admettent que la certification pourrait, en principe, devenir une incitation à la gestion durable, ils reconnaissent aussi que dans la pratique seule une petite fraction des bois tropicaux est destinée à des marchés qui demandent des produits certifiés.
Même si les sociétés considéraient financièrement intéressante les pratiques de gestion durable, Rice et ses collègues ne sont pas convaincus que cela serait la meilleure option. L’exploitation forestière, écrivent-ils, à toujours des effets environnementaux néfastes. Dans certains cas, ces impacts pourraient même être plus important si les sociétés adoptaient certaines des pratiques proposées par les tenants de la gestion durable. Créer de plus grandes ouvertures, par exemple, pourraient faciliter une production plus rapide de bois mais ont un effet néfaste sur la biodiversité.
Que proposent Rice et consorts à la place? Ils pensent que les gouvernements, les bailleurs de fond et les ONG devraient investir plus dans les aires protégées, publiques ou privées, y compris certaines zones exploitées par le passé. Pour quelles raisons, gouvernements ou communautés soutiendraient une telle approche? Cela reste très incertain. Mais peut-être est-ce le sujet du prochain rapport de
Rice et ses collègues ?
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Pour obtenir une copie électronique gratuite du papier de Rice et al. (au format PDF)ou pour questionner les auteurs, vous pouvez écrire à Terri Lam à mailto:t.lam@conservation.org.