Au Vietnam, la transition forestière entraîne des changements de politique

Le Vietnam a subi une transition forestière à très grande échelle.
, Monday, 27 Oct 2014
At 80,000 ha in 2010, Vietnam’s primary forests accountin for only 1 percent of national area.
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Collines boisées du nord du Vietnam. Le pays a subi la perte d’une grande partie de ses forêts originelles et mène actuellement des initiatives financières pour maintenir ce qu’il reste. Photo: Flickr

Le Vietnam a subi une transition forestière à très grande échelle.

Entre 1943 et 1990, le pays a perdu 5 millions d’hectares (ha) de forêt, ce qui ne représente pas moins de 28% de sa superficie terrestre totale. Le gouvernement a répondu par des mesures de reboisement, comprenant le développement de plantations, la ré-catégorisation des forêts, des réformes foncières et l’amélioration de la régénération naturelle des forêts. Ceci a étendu la couverture forestière sur environ 40% de la superficie terrestre en 2011.

Néanmoins, la superficie des forêts naturelles au Vietnam, tout comme leur état général, sont encore en déclin. L’étude du CIFOR sur la REDD+ au Vietnam a identifié les facteurs principaux de la déforestation: la conversion des terres pour l’agriculture et l’infrastructure, l’exploitation forestière non durable et les feux de forêt. Toutefois, d’autres forces moins évidentes sont également en jeu, y compris la demande croissante pour les produits forestiers et les terres, la croissance économique, l’évolution des facteurs démographiques, ainsi que les politiques actuelles qui favorisent des pratiques d’utilisation des terres non durables. La superficie des «forêts primaires» restantes a été estimée à 80 000 ha en 2010, ce qui représente seulement 1% de la superficie nationale du Vietnam. Ces forêts naturelles du Vietnam représentent les stocks les plus riches en biodiversité et en carbone du pays, tout en assurant également une protection importante des bassins versants.

Les PSEF représentent une avancée majeure pour le secteur forestier du Vietnam et ils ont subi de nombreuses modifications et améliorations au cours de la phase pilote

Pour améliorer la quantité et la qualité des forêts, le gouvernement a introduit en 2008 le programme de Paiements pour Services Environnementaux des Forêts (PSEF). Par des financements du secteur privé, les PSEF cherchent également à réduire les charges financières du secteur forestier du gouvernement central et visent à améliorer le bien-être social de la population locale. Suite aux projets pilotes de 2008 dans les provinces de Son La et Lam Dong, les PSEF ont été institutionnalisés à l’échelle nationale en 2011, une première en Asie du Sud-Est.

Le CIFOR a suivi les progrès du programme de près depuis ses débuts, en évaluant sa performance à travers des «3 E» – efficacité, efficience et équité – afin d’en tirer des enseignements comparatifs pour d’autres programmes mondiaux de PSE (Paiements pour Services Ecosystémiques), ainsi que pour les mécanismes de partage des bénéfices obtenus par la Réduction des Emissions issues de la Déforestation et la Dégradation des forêts (REDD+). L’Étude Comparative Mondiale du CIFOR sur la REDD+ reconnaît le soutien des revenus que la REDD+ peut fournir au système national de PSEF et aux stratégies de réduction de la pauvreté.

Le Vietnam est également l’un des six pays étudiés dans le cadre du projet actuel de Partage des Bénéfices du CIFOR, financé par la Commission européenne. L’accent est mis en particulier sur la gouvernance forestière à multiples niveaux, dans le contexte de la REDD+, et sur l’évaluation des perceptions locales concernant l’équité des PSEF. Ces études visent à fournir de nouvelles informations sur la légitimité des prises de décision à multiples échelles sur l’aménagement du territoire, en évaluant davantage les aspects de procédure et de distribution des PSEF.

«DES RESSOURCES FINANCIÈRES CONSIDÉRABLES»

Les succès et défis du programme de PSEF au Vietnam ont été exposés lors d’un récent atelier à Hanoï, où le CIFOR a présenté un exposé sur les enseignements tirés de ses recherches. Le but de l’atelier, organisé par le Fonds Vietnamien pour les Forêts et la Protection (VNFF), était de développer des idées sur l’avenir du programme de PSEF, tout en soulignant les possibilités d’amélioration des politiques. L’atelier a montré la volonté du gouvernement vietnamien d’apprendre des leçons du programme PSEF et des programmes similaires dans les pays limitrophes. Des acteurs nationaux et provinciaux de PSEF, ainsi que des chercheurs nationaux et internationaux, ont participé à cet atelier.

Les intervenants de l’atelier ont salué l’engagement du gouvernement face au programme de PSEF, qui a généré «des ressources financières considérables pour la protection des forêts vietnamiennes», déclare le Dr Vu Tan Phuong de l’Académie Vietnamienne des Sciences Forestières – soit environ 142 millions de dollars depuis la mise en œuvre du programme. Les services liés à la protection des bassins versants représentent la grande majorité de cet argent; les acheteurs étant les centrales hydroélectriques qui paient les propriétaires forestiers en tant que fournisseurs.

Suivi et évaluation du système de PSEF : conclusions principales et recommandations politiques du Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR)

L’atelier n’a pas manqué de discuter des lacunes du programme, comme par exemple le faible taux de paiement par hectare de forêt. Ces défis reflètent ceux identifiés dans le rapport du CIFOR, concernant le sujet «de la politique à la pratique» des PSEF. Ce rapport note: «Les paiements PSEF sont trop modestes pour couvrir les gains économiques non perçus de la déforestation». Il est suggéré que regrouper des programmes sociaux et environnementaux, y compris la REDD+, avec les PSEF pourrait fournir des mesures incitatives et des fonds plus importants afin de parvenir à des résultats environnementaux ou durables pour le développement.

De plus, l’atelier a souligné la mise en œuvre incomplète de politiques visant les PSEF et un système de suivi inadéquat pour évaluer les conséquences de la mise en œuvre des PSEF. Ces déficiences ont également été abordées dans le rapport du CIFOR, qui déclare que, malgré la réalisation d’un inventaire forestier national, les données disponibles sont insuffisantes pour délimiter les zones forestières ou pour évaluer la qualité des forêts au niveau local. En outre, il n’y a pas de références de base concernant les conditions environnementales et socio-économiques nécessaires pour évaluer les progrès de la performance.

Pourtant, malgré ces défis, les participants de l’atelier sont restés optimistes.

«Les PSEF représentent une avancée majeure pour le secteur forestier du Vietnam et ils ont subi de nombreuses modifications et améliorations au cours de la phase pilote», déclare Mme Pham Thu Thuy, une scientifique du CIFOR basée au Vietnam. Pour que le programme obtienne des résultats efficaces, efficients et équitables, «les décideurs politiques doivent travailler à l’élaboration d’un système fonctionnel de suivi et d’évaluation, avec un mécanisme de réclamation accessible, afin d’assurer la transparence», dit-elle.

Les mesures récentes prises par le gouvernement vietnamien indiquent que cela peut avoir lieu.

Les leçons tirées des recherches du CIFOR sur les PSEF au Vietnam du Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR)

Depuis l’atelier, une réunion PSEF de haut niveau a eu lieu, le vice-premier ministre Hoang Trung Hai et le Ministère vietnamien de l’Agriculture et du Développement rural (MADR) ont présenté une proposition de révision des politiques de PSEF. Dr Phuong a déclaré que le MADR et le VNFF s’appliqueront à finaliser les politiques de soutien à la mise en œuvre des PSEF, ainsi qu’à préparer les documents d’orientation. Entre temps, un système de suivi et d’évaluation sera placé en priorité pour assurer une mise en œuvre plus efficace et transparente des PSEF.

Ces mesures pourraient être efficaces sur le long terme pour protéger les dernières forêts primaires du Vietnam.

Pour plus d’informations sur les sujets abordés dans cet article, veuillez contacter Anastasia Yang sur a.yang@cgiar.org.

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