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Une étude scientifique publiée et dirigée par Serge Mandiefe Piabuo et Divine Foundjem-Tita du Centre de recherche forestière internationale et du Centre international pour la recherche en agroforesterie (CIFOR-ICRAF) propose de soutenir via des centres d’incubation les entreprises forestières communautaires afin de les faire fonctionner comme des entreprises, avec des structures établies et des rendements économiques.

Cette approche pourrait constituer un outil clé pour respecter l’engagement récemment pris par plus de 100 dirigeants lors de la 26ème Conférence des Parties (COP26) d’injecter 19,2 milliards de dollars pour stopper et inverser la perte de couverture forestière et la dégradation des terres d’ici à 2030.

Les chercheurs, qui ont utilisé les entreprises forestières communautaires camerounaises comme étude de cas, ont constaté des lacunes flagrantes dans la gestion des unités de gestion forestière communautaires, qui les privent de l’élan pour assurer leur croissance, ralentissant ainsi le développement des forêts gérées par les communautés.

   Cintres en rotin produits par l’entreprise forestière communautaire CODEM. Photo : ICRAF/Gilberte Koffi

L’étude, basée sur l’examen de documents et d’entretiens avec des responsables d’entreprises forestières communautaires dans 38 communautés, a révélé que seulement 11 % des entreprises gérées par les communautés pouvaient être définies comme des entreprises sociales. Les 63 % restants fonctionnent comme des organisations à but non lucratif ayant des activités génératrices de revenus, et 26 % comme des organisations traditionnelles à but non lucratif.

Les chercheurs rapportent ainsi : « La majorité des entreprises forestières communautaires (63 %) se sont engagées dans des activités commerciales pour générer des revenus mais n’avaient pas les compétences et la structure organisationnelle nécessaires pour utiliser des approches commerciales complètes associées à une discipline financière et à une propriété communautaire, qui sont les valeurs fondamentales des entreprises sociales ».

Le fait de fonctionner comme des entreprises sociales permettrait aux entreprises forestières communautaires d’être financièrement et écologiquement durables, et donc de contribuer aisément au développement communautaire.

Les experts affirment que pour faire passer les entreprises forestières communautaires du statut d’organisations à but non lucratif générant des revenus à celui d’entreprises sociales, un changement de mentalité s’avère nécessaire en matière de leadership, d’évaluation et de renforcement des capacités et de coordination communautaires, ainsi qu’un soutien via les centres d’incubation.

Le Cameroun a été choisi pour mener cette recherche car les entreprises forestières communautaires sont bien implantées dans ce pays d’Afrique centrale depuis la loi forestière de 1994 et son décret d’application de 1995, qui accordent aux communautés forestières le droit d’exploiter les ressources forestières (produits végétaux ligneux et non ligneux, ressources fauniques et halieutiques) pour le compte de la communauté, lorsqu’elles sont convenues dans un plan de gestion simple.

   Étang à poissons à Ngat Edou. Photo : ICRAF/Gilberte Koffi

Au cours des dernières années, la gestion communautaire des forêts a gagné en popularité pour la gestion des forêts tropicales, l’Afrique fournissant le meilleur exemple. En effet, d’après l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), 85 % des forêts sont détenues par des collectivités locales, tribales, et indigènes, 4 % seulement par des particuliers, et 11 % par des entreprises et des institutions commerciales.

En 1995, le Cameroun a promulgué un décret autorisant les droits d’accès et de gestion des communautés sur une superficie maximale de 5 000 hectares du domaine forestier non permanent pouvant être géré comme une forêt communautaire dans le but de renforcer la gestion participative et d’améliorer les moyens de subsistance des populations dépendantes des forêts.

Cette approche, qui est également censée promouvoir la gestion durable des forêts, n’a pas permis d’atteindre les résultats escomptés en matière de gestion participative des forêts et d’amélioration des moyens de subsistance, en raison de l’absence de génération de revenus, de faibles compétences commerciales, de l’accès limité aux marchés, des faibles niveaux de gouvernance, de l’inadéquation des politiques et de l’absence de réformes structurelles.

Le concept d’entreprise sociale, qui requiert l’existence d’une entité pour entreprendre des activités commerciales basées sur les forêts ou les arbres, qui soit dotée d’un organe représentatif crédible qui la supervise, donne une légitimité aux entreprises forestières communautaires au sein d’une communauté autodéfinie à qui elle permet de générer et de distribuer des bénéfices.

Ces initiatives devraient avoir un effet multiplicateur positif sur les économies rurales, favorisant ainsi la création d’emplois qualifiés, la génération de revenus plus élevés, l’amélioration des conditions commerciales et l’augmentation de la consommation.

Par ailleurs, dans l’étude intitulée Community Forest Enterprises (CFEs) as Social Enterprises: Empirical evidence from Cameroon, les scientifiques soulignent que les entreprises forestières communautaires sont promues parce que les incitations financières serviront de motivation supplémentaire aux communautés rurales pour mieux gérer et restaurer leurs forêts.

Les scientifiques soutiennent que lorsque les entreprises forestières communautaires sont gérées comme des entreprises sociales, elles commencent à fonctionner comme des organisations de l’économie sociale, ce qui pourrait ainsi renforcer leur développement et leur croissance.

Cette nouvelle structure pour les entreprises forestières communautaires permettrait également d’apporter un éclairage nouveau sur la façon dont les communautés locales gouvernent et progressent en vue d’atteindre leurs objectifs de développement dans plusieurs domaines.

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