Selon une nouvelle étude, un dispositif simple pourrait soulager les forêts éthiopiennes. Il rend la cuisson plus efficace tout en réduisant les émissions de carbone.
Les fours améliorés (en anglais Improved Cooking Stoves, ICS) ont une longue histoire dans les projets de développement et de conservation de la nature, car ils permettent de réduire la pression sur les ressources forestières tout en améliorant les moyens locaux de subsistance. Néanmoins, le succès des activités liées à ces fours dépend d’une variété de facteurs, dont la qualité et la convenance de l’appareil de cuisson spécifique, ainsi que l’ampleur des activités associées à la mise en œuvre, telles que formations et campagnes d’information au niveau local.
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Récemment, la revue Land a publié une étude, menée en partie par des chercheurs du Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR), sur les économies de bois de feu et la réduction des émissions de carbone grâce à l’utilisation des fours améliorés dans la Réserve de biosphère de Kafa en Ethiopie. Pour évaluer le potentiel des fours améliorés à atténuer les impacts négatifs de la collecte du bois de feu sur les forêts, l’étude a donné lieu à des tests d’efficacité des fours et à des enquêtes, au total 140 entretiens, auprès des ménages concernés.
CONTEXTE
La déforestation et la dégradation des forêts sont des problèmes majeurs en Ethiopie. Entre 1990 et 2010, le pays a perdu chaque année environ 140 000 hectares de son couvert forestier. La Réserve de biosphère de Kafa dans le sud-ouest de l’Ethiopie est l’une des dernières zones du pays couverte d’un taux élevé de forêts naturelles. Elle a été reconnue comme faisant partie du Point sensible de biodiversité afro-montagnarde orientale, d’une Zone clé pour la biodiversité et d’une réserve de biosphère de l’UNESCO.
De 2009 à 2014, l’Association allemande de protection de la nature (NABU) a mis en œuvre un projet de grande envergure intitulé «La biodiversité face au changement climatique: conservation, gestion et développement de forêts sauvages de café par les communautés», financé par l’International Climate Initiative (IKI) allemande. La diffusion des fours améliorés faisait partie intégrante du projet, étant donné que la collecte de bois de feu constitue un des facteurs majeurs de déforestation et de dégradation des forêts en Ethiopie.
Le bois est utilisé pour cuire à la manière traditionnelle, sur un feu ouvert avec une plaque d’argile (mitad) reposant sur trois pierres (connu sous le nom de méthode à trois pierres) afin de cuire l’injera, le pain éthiopien typique à base de farine de teff. Cependant, cette forme de cuisson n’utilise pas le carburant de manière efficace et crée des risques pour la santé dus à la fumée émise ainsi que des risques de brûlures.
Les fours appelés Mirt – conçus spécifiquement pour ce style de cuisson – ont une chambre de combustion qui canalise la chaleur vers le mitad et vers une cheminée supplémentaire. Le four est plus efficace, il peut s’utiliser avec une plus grande variété de combustibles, tels que les résidus de biocarburants sous forme de copeaux de bois. Il permet de préparer plusieurs plats en même temps (une casserole pour préparer de la sauce sur la cheminée, de l’injera sur le mitad). En outre, le four réduit la quantité de fumée produite, ainsi que le risque de se brûler pendant la cuisson.
Environ 11 000 fours améliorés ont été mis à la disposition des communautés locales dans la Réserve de biosphère. Les bénéficiaires des fours ont été sélectionnés selon des critères sociaux visant à garantir l’accès aux fours, indépendamment du revenu et du niveau d’éducation. Le but de l’introduction des fours améliorés est de réduire le besoin en bois de feu. De plus, en soutenant une combustion plus efficace grâce aux nouveaux fours, la pression sur les forêts est également réduite.
RÉSULTATS
Selon l’étude, la quantité de bois a été réduite d’environ 40% par rapport aux méthodes traditionnelles de cuisson pour la préparation de l’injera. La réduction de l’usage de bois se traduit par une économie de 11 800 tonnes d’émissions de dioxyde de carbone par an, ce qui équivaut à la quantité de carbone stockée dans plus de 30 hectares de forêt au sein de la Réserve de biosphère.
En supposant que la durée de vie de chaque fours est de quatre ans, 80% des fours étant utilisés régulièrement, les scientifiques estiment une économie de plus de 45 000 tonnes de bois. Étant donné que la technologie de cette solution est peu sophistiquée, les chercheurs s’attendent à ce que les ménages voisins cherchent à copier cette méthode pour économiser du bois, ce qui implique une augmentation de la demande de fours.
En outre, l’étude a démontré des effets secondaires positifs pour les ménages grâce à la réduction des risques de brûlures, au développement restreint de fumée, au meilleur goût des aliments préparés et à une diminution des dépenses pour le bois.
D’après l’étude, on peut envisager d’éventuelles améliorations du Mirt, concernant des tailles et des composants différents, ainsi qu’un remplacement possible de la plaque d’argile traditionnelle par une plaque en fer. Ces recommandations sauront soutenir les futures activités liées aux fours améliorés dans le suivi du projet du NABU.
Le programme des fours améliorés figure parmi des nombreux programmes de diffusion de fours dans le monde entier. En Ethiopie, ils même nombreux, bien que le projet du NABU soit l’un des plus importants. Le four Mirt a été conçu spécifiquement pour les modes de cuisine en Ethiopie et en Erythrée, ce qui limite sa reproductibilité à l’extérieur de la région.
Martin Herold est associé principal du CIFOR. Nils Horstmeyer est stagiaire au programme allemand du Naturschutzbund (NABU) en Afrique. Elisabeth Dresen est expert en foresterie et en géoinformation au SILVANUM en Allemagne.
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