L’équation de 9 milliards de personnes: Sécurité alimentaire & pourquoi la biodiversité est importante

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12 cultures et 14 espèces animales procurent aujourd’hui 98% des besoins alimentaires mondiaux, parmi lesquels le riz et le maïs seuls comptent plus de 50% de la consommation énergétique globale. Photo Courtoisie de Peter Blanchard/flickr

BOGOR, Indonésie (12 Avril, 2011) La sécurité alimentaire est devenue un des enjeux les plus importants de notre temps. En février, The Economist a publié un rapport spécial sur le « future de l’alimentation » intitulé “ L’équation de 9 milliards de personnes’’ (The 9 billion-people question). Le rapport soutient que plus d’aliments peuvent pousser sur les terres actuelles à travers une intensification plus accrue et des appels à une seconde “Révolution Verte” – le développement de variétés de cultures à grand rendement et l’élevage intensif à grande résistance à la sécheresse et aux maladies. Le rapport affirme aussi que la hausse des prix des produits réduit les pertes.

Le rapport présente de manière détaillée la complexité des questions liées à la sécurité alimentaire et propose des arguments irréfutables en guise de solutions pour y parvenir, incluant l’accroissement des financements au Groupe Consultatif de Recherche Agricole Internationale (GCRAI), qui a conduit la première Révolution Verte. Toutefois, il passe à côté d’une question: il omet de reconnaitre l’importance de la biodiversité dans l’agriculture durable.

Les politiques et sujets liés à la biodiversité et la sécurité alimentaire ont toujours été considérés  comme mutuellement exclusifs avec peu de considération pour leur nette interdépendance. Le modèle contemporain de production de monoculture agricole a conduit à la perte dévastatrice de la biodiversité et un grand nombre de services environnementaux du fait de la conversion des terres. L’agriculture industrielle, à base pétrochimique, contribue elle aussi de manière significative aux émissions de gaz à effet de serre.

En dépit d’avancées considérables ces 40 dernières années, l’agriculture moderne n’est pas parvenue à assurer la sécurité alimentaire mondiale, du moins de façon équitable. Plus d’un milliard de personnes se couchent affamées chaque nuit et plus de 800 millions autres souffrent de déficiences nutritionnelles pouvant conduire à long terme à des impacts négatifs sur leur santé, et en fin de compte affectent leur capacité à se nourrir eux-mêmes.

Alors, quel peut être le lien entre biodiversité et agriculture ? La biodiversité soutient la majorité de l’agriculture moderne, et contribue aux moyens d’existence de plusieurs millions de personnes qui dépendent de la cueillette des ressources naturelles. La biodiversité procure aussi le “capital naturel” pour les services environnementaux, tels que la maintenance des services des bassins versants, la fertilité des sols,  la pollinisation, la dispersion des semences, le cycle des éléments, le contrôle naturel des nuisances et des maladies etc. ; processus qui sont importants pour la maintenance des systèmes agricoles.

Bien que plusieurs milliers d’espèces aient contribué à la nutrition humaine, aujourd’hui, 12  cultures et 14 espèces animales assurent 98% des besoins alimentaires mondiaux, avec le riz et le maïs comptant plus de 50% de la consommation énergétique globale. La tendance mondiale vers la généralisation diététique a conduit à des impacts négatifs sur la sécurité alimentaire, la balance nutritionnelle et la santé.

Plusieurs écosystèmes fournissent une plus grande résilience aux effets des défis environnementaux et sont capables de réduire la vulnérabilité des moyens d’existence ruraux. Alors que les éléments de la biodiversité utilisés dans l’alimentation et l’agriculture déclinent, l’Agriculture devient moins capable de s’adapter aux défis environnementaux, tells que le changement climatique.

Les systèmes de production traditionnelle de monoculture sont particulièrement vulnérables aux événements climatiques extrêmes, et les inondations et sécheresses récentes dans les régions de productivité agricole ont été identifiées comme les principales causes des prix des produits alimentaires record en début 2011. L’impact des températures croissantes et  les événements climatiques plus extrêmes vont probablement toucher les pauvres, spécifiquement les paysans ruraux, et la Banque Mondiale estime que 44 millions de personnes de plus ont régressé dans la pauvreté depuis juin 2010.

Maintenant que le monde devient progressivement urbanisé, ces problèmes sont plus exacerbés. La population urbaine est particulièrement vulnérable aux flambées des prix. Les manifestations au Cameroun et Haiti en 2008 et les récents changements de régime en Tunisie et Egypte ont été directement liés à la flambée des prix des produits alimentaires de base. Pour cette raison, le modèle inflationniste (high-price demand model) soutenu par The Economist pourrait avoir des impacts significatifs sur ceux qui ont besoin d’accéder à des offres de coûts alimentaires raisonnables: les pauvres.

Un nombre croissant de chercheurs suggèrent que l’intégration de la biodiversité dans l’agriculture (“éco-agriculture” or “agro-écologie”) peut améliorer les récoltes, maintenir les services essentiels d’écosystèmes et réaliser une plus efficiente et équitable sécurité alimentaire, particulièrement face à des conditions climatiques incertaines. Dans de récentes publications, la Banque Mondiale, les Nations Unies, le Bureau des Sciences du Gouvernement britannique, associés à plusieurs dans la communauté académique, proposent que le défi de nourrir une population mondiale projetée à 9 milliards en 2050 peut être réaliser à travers plus de systèmes de production diverses que promeut l’agriculture durable.

La rapide intégration de la conservation de la biodiversité et l’agriculture pour réaliser la sécurité alimentaire est un défi mondial qui va en fin de compte nous affecter tous. Le vénéré écologiste Hugh Possingham a récemment posé la question “pouvons nous avoir notre biodiversité et la consommer aussi?” L’évidence suggère que nous le pouvons.

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Pour plus d’information sur ce sujet et la recherché récente du CIFOR liées au sujet, voir ici.

 

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