TURRIALBA, Costa Rica (27 janvier 2014) – De nouvelles études montrent qu’en Amérique centrale et au Mexique le climat de plus en plus chaud et sec pourrait affecter négativement la biodiversité et les services écosystémiques de la région au cours des 20 prochaines années. Ceci pose des défis particuliers aux agriculteurs, aux décideurs politiques et aux gouvernements de la région méso-américaine, selon une étude présentée lors d’une conférence récente au Costa Rica.
«D’ici 2020 ou 2030, l’Amérique centrale pourrait se retrouver dans une situation pour laquelle il n’existe pas d’antécédent historique», déclare Pablo Imbach, agronome et expert en gestion des bassins versants au Centre Agronomique Tropical de Recherche et d’Enseignement supérieur (Centro Agronómico Tropical de Investigación y Enseñanza, CATIE). Lors de la septième Conférence Scientifique Interaméricaine Henry A. Wallace qui a marqué le 40ème anniversaire de la fondation CATIE, M. Imbach a signalé que les mesures dans la région montrent une augmentation constante de la température moyenne.
Les tendances des précipitations sont moins évidentes. Pourtant, en dépit de cette incertitude, la réduction du ruissellement de l’eau dans toute la région méso-américaine est probable. Ceci mènerait à la disparition d’espèces des forêts tropicales humides, à la faveur d’une végétation adaptée à un climat plus sec, selon Bruno Locatelli, spécialiste en foresterie et en hydrologie au Centre de Recherche Forestière Internationale et au Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD).
En modélisant les interactions entre l’eau et la végétation, M. Imbach et M. Locatelli ont constaté que la densité et la structure de la végétation, ainsi que les écosystèmes et les fonctions des écosystèmes sont susceptibles de changer à l’avenir, en particulier dans les zones où le paysage boisé est remplacé par des prairies.
La végétation et les eaux de ruissellement interagissent de façon complexe, dit M. Imbach. Les changements des précipitations, de la température et de l’humidité peuvent modifier la densité et la composition végétale. Lorsque les plantes ont accès à plus d’eau, elles font pousser plus de feuilles, transpirent plus (en émettant de la vapeur) et réduisent le ruissellement. Si le sol est plus sec, elles perdent leurs feuilles ou meurent, permettant à davantage d’eau de s’écouler.
Contrairement à d’autres études, les scénarios modélisés par M. Imbach, M. Locatelli et leurs collègues ont pris en compte ces interactions. Ceci a abouti à des prévisions plus détaillées des évolutions probables de la végétation selon divers scénarios du changement climatique.
«Nous avons combiné 136 scénarios différents, afin de déterminer la probabilité des changements de caractéristiques des écosystèmes», déclare M. Locatelli.
En calculant, par exemple, pour cette série de scénarios la probabilité du ruissellement des eaux, au lieu de considérer simplement les variations moyennes, leur analyse peut aider les décideurs politiques à établir des priorités afin de cibler des zones spécifiques en Méso-Amérique. «Concernant certains aspects du changement climatique, il peut rester des incertitudes. Néanmoins, au vu des scénarios que nous avons examinés, nous savons que dans certaines zones, telles que le Yucatan [dans le sud-est du Mexique], une diminution de la disponibilité en eau est presque certaine», déclare M. Locatelli.
Fort de cette connaissance, les décideurs politiques pourraient investir des ressources dans des projets et des programmes afin de se préparer à un avenir plus sec. Si la probabilité était faible, ils pourraient définir des priorités différentes, dit M. Locatelli.
Comprendre la probabilité des différents scénarios pour des zones locales peut également aider les représentants des administrations locales à évaluer à quel point les populations de ces zones sont vulnérables au changement climatique et à prendre des mesures pour les aider à s’adapter. Ceci nécessite une planification aux niveaux national et local, dit M. Locatelli.
Les agriculteurs, par exemple, s’inquiètent surtout de l’impact des variations interannuelles des températures et des précipitations sur leurs cultures, dit-il.
Les décideurs politiques pourraient adopter une vision à plus long terme. Toutefois, même eux ne perçoivent pas nécessairement le changement climatique comme une menace majeure, selon une étude du CIFOR.
«Nous parlons ici d’impacts qui, d’après nos connaissances actuelles sur le changement climatique, vont très probablement avoir lieu à l’avenir en Méso-Amérique», explique M. Locatelli. «Les résultats de notre travail peuvent aider les décideurs politiques nationaux, les promoteurs de projets et les praticiens à décider comment s’adapter.»
Pour plus d’informations sur les sujets abordés dans cet article, veuillez contacter Bruno Locatelli sur b.locatelli@cgiar.org.
Ce travail s’inscrit dans le cadre du Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie et est soutenu par le projet MESOTERRA du Programme agroenvironnemental méso-américain du Centre Agronomique Tropical de Recherche et d’Enseignement supérieur (CATIE).
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