A la recherche de sécurité alimentaire dans les forêts d’Afrique Centrale

De plus en plus de forêts d'Afrique Centrale sont détruites au profit de denrées de base riches en calories et pauvres en nutriment et des récoltes lucratives comme le maïs ou le manioc.
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Forests have long been a crucial source of nutritious food for people in Central Africa. Ollivier Girard/CIFOR

Les forêts ont longtemps été une source d’alimentation cruciale pour les habitants d’Afrique Centrale. Ollivier Girard/CIFOR

De plus en plus de forêts d’Afrique Centrale sont détruites pour faire place à des denrées de base, riches en calories et pauvres en nutriments, et à des récoltes lucratives comme le maïs ou le manioc. Mais il semble que la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique Centrale pourrait revenir à ses racines: les forêts.

Les forêts ont longtemps été une source cruciale d’aliments nutritifs pour les habitants d’Afrique Centrale, mais l’urbanisation, la pression agricole et l’intégration de la région dans le marché économique mondial en a mené beaucoup loin des modes de vie des décennies précédentes.

Essimi Menye, le Ministre camerounais de l’Agriculture et du Développement Rural, se rappelle cependant le temps où les forêts du Cameroun étaient une question de survie pour sa famille.

Chaque mois de mai, les cultures familiales étaient en fleur mais il n’y avait encore rien à récolter et peu à manger. Alors on avait recours aux forêts locales.

C’est là qu’on trouvait de la nourriture (fruit, viande…) nous vivions de la chasse de petits animaux, même des insectes”, explique-t-il depuis la conférence stratégique de deux jours La gestion durable des forêts d’Afrique centrale: hier, aujourd’hui et demain.

Mais aujourd’hui, nous n’avons plus ces périodes de carence”, ajoute Menye.

Maintenant nous avons le blé.”

Comme dans de nombreux pays en développement, l’accent mis sur l’accroissement de la production de cultures riches en calories, comme le blé ou le riz, a souvent été au dépend des forêts*. De plus, atteindre la sécurité alimentaire et nutritionnelle requiert plus qu’une simple augmentation de la production des denrées de base.

Récemment, les chercheurs du CIFOR* et d’ailleurs ont commencé a adopter un regards plus holistique sur le rôle que jouent les forêts, en tant qu’élément d’un paysage plus vaste, qui apporte des aliments nutritifs aux ruraux.

Mangez vos légumes

La déficience de nutriments tourmente l’Afrique et cause “la faim invisible”, même quand il y a assez de nourriture à manger. Près de 30% des habitants de l’Afrique ont une déficience en vitamine A, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Le taux d’anémie parmi les enfants du continent est scandaleusement élevé, à 68%. Ce qu’il faut, selon le scientifique du CIFOR Bronwen Powell, c’est plus de diversité alimentaire.

Les experts du monde de la nutrition promeuvent un régime diversifié parce que c’est holistique. Manger une alimentation variée peut aider à assurer l’absorption de multiples nutriments essentiels, plutôt que de se concentrer sur un seul nutriment à la fois”, dit-elle.

Les chiffres le montrent clairement : l’Afrique a un des taux de consommation de fruits et légumes les plus bas du monde, dit Powell, citant une étude de l’Institut International de Recherche sur les Politiques Alimentaires (IFPRI)*.

Alors que l’agriculture est importante pour la réservation des cultures de base, les forêts et les aliments sauvages apportent une diversité d’aliments supplémentaires. Fruits, viande, légumes et les légumes feuilles – nourriture remplie de micronutriments – peuvent être trouvés en abondance dans les forêts saines et bien gérées.

Mais une forêt “domptée” est une option lucrative. Zac Tchoundje, forestier du World Agroforestry Centre, travaille sur la domestication des arbres fruitiers en Afrique Centrale depuis les années 1990, afin d’améliorer la nutrition et le développement économique.

Les populations rurales du Cameroun qu’il a essayé d’aider étaient réticents dans un premier temps, mais quand il leur a demandé ce qu’ils attendaient de la recherche, “ils nous ont donné une feuille de route,” dit Tchoundje.

Ils voulaient des arbres qui produisent beaucoup de fruits, et vite, et pas trop haut de sorte que les enfants ne se blessent pas en tombant des arbres lors des collectes de fruits.”

L’équipe de Tchoundje s’est mise au travail, et maintenant ces arbres domestiqués – dont la plupart sont des manguiers – ne fournissent pas seulement de la nourriture, mais aussi une source de revenus pour les ruraux qui vendent leurs surplus de fruits.

Mais résoudre la question de la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Afrique Centrale ne se limite pas simplement à introduire de nouvelles variétés de cultures et à planter plus d’arbres, selon les experts.

Il faut une planification prudente et une recherche stratégique, dit Powell. “Il est essentiel de tenir compte, au niveau politique, de la manière dont les questions forestières vont affecter les changements de régime, en particulier pour la consommation de fruits et légumes.”

Pour les chercheurs du Bassin du Congo cependant, il devient clair que les forêts jouent un rôle plus important pour nourrir les ruraux que ce qu’on pensait auparavant. Cela permet de repenser la sécurité alimentaire alors que la malnutrition persiste bien que de nombreuses personnes aient assez à manger.

Quand vous mangez jusqu’à satiété, vous atteignez la sécurité alimentaire”, explique Tchoundje, mais “la sécurité nutritionnelle, c’est autre chose.”

*Liens non traduits en français

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