Les scientifiques sont en train de développer avec les autorités nationales et les populations locales du Bassin du Congo des systèmes de gestion des forêts multiressource*. Ces-derniers optimisent les ressources des forêts, pour une production durable des produits et services forestiers, comme le bois, la régulation de l’eau, la production alimentaire, les besoins culturels et les demandes en énergie.
Mais Robert Nasi, le directeur du Programme de Recherche du CGIAR sur les Forêts, les Arbres et l’Agroforesterie, explique que peu de gouvernements appliquent ces mécanismes.
“La culture politique ne prend pas en compte le partage des ressources, chaque petite partie voit son intérêt personnel”, dit-il.
“Il y a la crainte que, en associant leurs forces avec un autre ministère, les différentes autarcies du gouvernement perdent leur pouvoir”.
Cette question est explorée dans une étude récente* du CIFOR et du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD). Elle examine si la biodiversité et la production de bois peuvent coexister dans les forêts du Bassin du Congo.
Situé en Afrique subsaharienne, le Bassin du Congo possède la deuxième plus grande zone de forêts tropicales au monde, et une des plus riches biodiversité – comprenant de nombreuses espèces de grand singes* menacés.
C’est aussi un écosystème qui fourni des moyens de subsistance à quelques 60 millions de personnes, qui cultivent des produits ligneux et non-ligneux comme la viande de brousse, le poisson, les fruits, et les noix comme moyens de subsistance ou pour leur commercialisation.
Cependant, près de 26% de la sous-région du bassin du Congo est désormais dédié aux concessions forestières industrielles. Pour fonctionner, les concessions doivent détenir un document technique appelé Plan d‘aménagement forestier*, selon les lois forestières de tous les pays de la région.
Typiquement, ces plans incluent un inventaire systématique de toutes les espèces d’arbres au-delà d’un certain diamètre, avant de décider quels volumes de quelles espèces seront cultivés sur la concession.
Les normes d’aménagement exigent aussi que les propriétaires des concessions détaillent les aspects socio-économiques de la concession et des zones environnantes, les caractéristiques géographiques et économiques et la présence de faune et de flore. Tout cela doit influencer la manière dont les propriétaires de concessions fonctionnent.
L’objectif est non seulement d’encourager la préservation des espèces, mais aussi d’améliorer la qualité de vie des communautés locales, via la création d’emploi et la formation.
“Cependant, la qualité de telles études varie considérablement”, regrette Alian Billand, scientifique du CIRAD et co-auteur de l’étude.
La biodiversité est particulièrement délaissée au profit d’une “utilisation unique” des plans d’aménagement forestier qui utilisent le bois comme unique ressource économique. Ces plans ignorent généralement les soucis plus large de durabilité, qui concernent notamment la population locale.
Besoin d’efforts harmonisés pour protéger la biodiversité
Les autorités chargées des questions de biodiversité dans les concessions forestières demeurent mal coordonnées dans la région.
De plus, chaque administration – celle chargée des concessions, et une autre des zones protégées – considère seulement leur seul processus de plannification et a très peu de manières d’harmoniser ses activités sur le terrain.
“Par exemple, les administrations qui s’occupent des productions forestières et des zones protégées – qui appartiennent parfois au même ministère – considèrent seulement leur processus de planification et ont très peu de procédures pour harmoniser leurs activités en faveur de la biodiversité sur le terrain”, dit Billand.
Cependant, alors que le marché demande un bois provenant de sources durables écologiquement et socialement, des sociétés de la sous-région commencent à mesurer l’importance de rester dans les lignes.
Une étude récente sur le paysage tri-national de la Sangha au Cameroun a montré qu’un mélange de concessions forestières et de zones protégées a permis un équilibre entre la préservation et le développement local. Des animaux sauvages en danger, comme l’antilope Bongo, les éléphants des forêts, les gorille et les oiseaux restent nombreux dans les zones d’exploitation forestière. Les forêts semblent aussi bien récupérer après l’abattage, selon l’étude.
“Malgré les problèmes de la région, il est possible de développer des plans d’aménagement forestier à usages multiples qui combinent protection et production”, affirme M.Nasi.
“Mais cela demande l’implication de tous les intervenants dans la conception et l’application des plans d’aménagement”.
Pour plus d’informations sur les questions discutées dans cet article, veuillez contacter Robert Nasi sur r.nasi@cgiar.org
Ce travail s’inscrit dans le cadre du Programme de Recherche du CGIAR sur les Forêts, les Arbres et l’Agroforesterie avec le soutien d’USAID et de la Commission Européenne.
* liens non traduits en français
Ce sujet sera l’un des thèmes discutés lors de la conférence de deux joursLa gestion durable des forêts d’Afrique centrale: hier, aujourd’hui et demain à Yaoundé au Cameroun les 22 et 23 mai 2013. .
Retrouvez les reportages du CIFOR sur les forêts d’Afrique Centrale sur forestsnews.cifor.org/fr/yaounde
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