Des bûcherons d’Afrique Centrale pourraient être forcés d’abandonner leur activité en raison des lourds coûts nécessaires à leur mise en conformité avec les règles d’importation de bois en Europe et aux Etats-Unis, selon les experts du CIFOR.
“Les bûcherons doivent maintenant supporter les coûts liés à la création de nouveaux plans de gestion des forêts, contrôler le bois et assurer qu’ils possèdent une licence légale qui satisfait les exigences de l’Union Européenne et des Etats-Unis”, explique Richard Eba’a Atyi, scientifique du CIFOR et co-auteur d’une nouvelle étude sur l’impact des politiques internationales en matière de bois* dans le secteur forestier d’Afrique Centrale.
“Cela s’élèverait environ à 5000 dollars américain par communauté forestière – ce qui représente le revenu moyen de dix membres de la communauté.”
Mais les responsables politiques au Cameroun qui délivrent les titres forestiers pourraient aider à alléger certains de ces coûts en apportant un support technique lors du développement de nouveaux plans de gestion forestier, dit-t-il.
Les ONG environnementales ont lancé une campagne il y a plusieurs années accusant les entreprises d’utiliser des produits ligneux qui ne provenaient pas de sources utilisant des méthodes d’exploitation légales ou durables.
Avec un solide soutien de l’opinion publique, ces efforts ont permis la création d’une série de réglementations rigoureuses en Europe (FLEGT/VPA*) et aux Etats-Unis (Lacey Act*).
Ce sujet sera l’un des thèmes discutés lors de la conférence de deux joursLa gestion durable des forêts d’Afrique centrale: hier, aujourd’hui et demain à Yaoundé au Cameroun les 22 et 23 mai 2013. .
Retrouvez les reportages du CIFOR sur les forêts d’Afrique Centrale sur forestsnews.cifor.org/fr/yaounde
De telles règles visaient aussi à influencer les politiques nationales de pays exportateurs de produits issus du bois, comme le Cameroun, afin qu’ils encouragent un bois produit légalement.
“Nous avons accueilli cela comme une évolution bienvenue, mais très vite, nous avons commencé à voir le revers de la médaille”, dit Samuel Assembe-Mvondo, scientifique du CIFOR et co-auteur de l’étude.
L’Afrique Centrale est la région du monde la plus impliquée dans les politiques d’achat internationales du bois. Elle représente aussi une des parts les plus importantes des importations en bois tropical sur le marché européen.
Selon la politique forestière au Cameroun, le droit à l’abattage de bois peut être légalement accordé à des entreprises (ou groupes d’entreprises) commerciales ou à des personnes privées. Le gouvernement a identifié neuf types de titres légaux de droit d’exploitation du bois* au Cameroun. Mais comme ils sont très différents, l’application de la loi forestière et la gestion de l’activité de la forêt est un défi majeur.
L’étude du CIFOR s’est concentrée sur le Cameroun parce qu’en 2004, il est devenu le premier pays à engager des négociations avec l’Union Européenne sur l’Accord de Partenariat Volontaire sur l’Application des règlementations forestières, gouvernance, et les échanges commerciaux (FLEGT/VPA).
Les scientifiques ont conclu que si les politiques pouvaient contribuer à une gestion durable des ressources forestière en Afrique Centrale, sur le long terme, beaucoup de petits gestionnaires de forêts seront incapables d’appliquer les règlementations sans aide extérieure. Les propriétaires de concessions forestières industrielles qui récoltent du bois pour l’exporter sont particulièrement touchés, car ils sont forcés de se conformer à des standards bien plus élevés.
“Les dirigeants locaux impliqués dans l’octroi de titres pour les communautés forestières devraient aider davantage les communautés locales à satisfaire les exigences de l’accord FLEGT/VPA, afin qu’elles n’aient pas à payer un coût supplémentaire pour obtenir une preuve de la légalité du bois”, selon Eba’a Atyi.
Sans cette aide, les petits bûcherons seront amenés à cesser leur activité, dit-il, et cela aura des conséquences dommageables sur les économies des pays d’Afrique Centrale.
“Nous ne voulons pas nous retrouver face à une situation où le docteur devient, sans le vouloir, le croque-mort.”
* liens non traduits en français
Pour plus d’informations sur les questions discutées dans cet article, veuillez contacter Samuel Assembe sur s.assembe@cgiar.org
Ce travail s’inscrit dans le cadre Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie, avec l’aide de l’Union Européenne.
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