Alors que le changement climatique a des répercussions sur le Bassin du Congo, les efforts s’intensifient pour protéger les forêts de la région. Mais de nouvelles recherches montrent qu’une ressource cruciale est négligée : l’eau.
« Les forêts de la région attirent de plus en plus l’attention à l’échelle mondiale, on ne peut pas en dire autant de ses ressources en eau », a dit Denis Sonwa, chercheur au CIFOR et principal auteur de l’article intitulé Gérer les ressources en eau de l’Afrique: intégrant l’utilisation durable des terres, des forêts et des pêches, récemment publié dans la revue Nature et Faune.
« À l’heure actuelle, très peu est fait pour comprendre les liens écologiques entre les forêts et l’eau. »
« Nous avons besoin d’une gestion intégrée des secteurs de la foresterie et de l’eau. »
Le bassin du fleuve Congo représente près d’un tiers de l’ensemble des ressources en eau de l’Afrique. Il aide à alimenter les forêts, à fournir des moyens de subsistance et à produire de l’énergie.
L’Afrique centrale est la région la plus humide du continent – l’évaporation des cours d’eau et la transpiration des arbres constituent jusqu’à 70% des précipitations.
Mais elle commence peu à peu à se dessécher.
Les précipitations ont nettement diminué depuis les années 1970, tandis que la réduction du bassin versant sur un long terme a été observée depuis le début des années 1990. Dans les années années à venir, on prévoit des pics plus extrêmes pendant les saisons humides et sèches. Les périodes de sécheresse épuiseront davantage le bassin versant et de fortes précipitations présenteront des risques d’inondation.
Les organismes régionaux pour l’hydrologie telle que la Commission internationale du Bassin du Congo-Oubangui-Sangha ont pourtant du mal à attirer l’attention, dit Mme Sonwa, et même les gouvernements locaux n’ont pas encore réagit à la réduction des ressources en eau.
« Ils ont besoin de commencer à voir cela comme un enjeu important », a t-il dit.
« Cela doit être placé tout en haut dans leurs priorités. »
Ce sujet sera l’un des thèmes discutés lors de la conférence de deux joursLa gestion durable des forêts d’Afrique centrale: hier, aujourd’hui et demain à Yaoundé au Cameroun les 22 et 23 mai 2013. .
Retrouvez les reportages du CIFOR sur les forêts d’Afrique Centrale sur forestsnews.cifor.org/fr/yaounde
La plupart des 77 millions de personnes vivant le long du bassin du Congo n’ont déjà pas accès à de l’eau potable, a expliqué Mr Sonwa, en ajoutant que sans une approche intégrée à la gestion de l’eau, il sera difficile de changer les choses.
La liste des avantages potentiels est énorme.
Des méthodes d’irrigation améliorées pourraient relancer l’agriculture dans la région, tout en assurant la sécurité alimentaire, a t-il dit, alors que les cours d’eau naturels pourraient fournir des voies de transport dans une région sous-développée en infrastructure routière.
L’argent généré par l’hydroélectricité – qui pourrait remplacer le bois en tant que principale source d’énergie dans la région, tout en réduisant les pressions sur les forêts – pourrait également aider à soutenir les efforts de conservation.
« Le paiement pour des services environnementaux dans les domaines de l’eau et de l’énergie pourrait potentiellement refinancer la gestion du bassin versant, la collecte des données et leur analyse », a déclaré Mr Sonwa.
Préserver le carbone dépend de l’eau
Les projets liés à la prévention de la perte des forêts et de la dégradation des terres le long du Bassin du Congo – qui traverse le Cameroun, le Congo, la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, le Gabon et la Guinée équatoriale – ont reçu un important soutien international et régional, en partie à cause de leur rôle potentiel dans la lutte contre le changement climatique.
Dans un cadre soutenu par l’ONU – la Réduction des Émissions issues de la Déforestation et de la Dégradation des forêts* (ou REDD +), les pays en voie de développement de la région reçoivent des incitations pour assurer que les arbres, qui rejettent du dioxyde de carbone dans l’atmosphère lorsqu’ils sont coupés ou brûlés, restent debout.
« Encore une fois, ce n’est qu’une partie de l’équation », a dit Mr Sonwa.
« Il est irréaliste de penser que nous pouvons préserver des stocks de carbone sans tenir compte de l’eau de laquelle dépendent les formations forestières et les populations. »
Alors que la compréhension des liens entre l’eau et les forêts s’améliore, Mr Sonwa préconise que la gestion de l’eau doit impérativement jouer un rôle plus important, tant au niveau régional qu’international.
Pour plus d’informations sur les questions discutées dans cet article, veuillez contacter Denis Sonwa sur d.sonwa@cgiar.org
Ce travail fait partie du projet Forêts du Bassin du Congo et Adaptation au Changement Climatique qui s´inscrit dans le cadre du Programme de Recherche du CGIAR sur les Forêts, les Arbres et l’Agroforesterie. Il est soutenu par le Centre de recherches pour le développement international et le Département britannique pour le développement international.
* liens non traduits en français
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