Une bureaucratie paralysante retient les scieurs congolais dans un bourbier juridique

BOGOR, Indonésie (28 mars 2012) _ Les operateurs de tronçonneuse à petite échelle en République du Congo risquent de perdre leurs moyens de subsistance, car la bureaucratie paralysante rend ces scieurs incapable d´obtenir les permis d'exploitation nécessaires pour répondre aux conditions d'un nouveau accord forestier avec la Commission européenne.
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Sign on log, Cameroon, April, 2009

Photo de Terry Sunderland/CIFOR

BOGOR, Indonésie (28 mars 2012) _ Les operateurs de tronçonneuse à petite échelle en République du Congo risquent de perdre leurs moyens de subsistance, car la bureaucratie paralysante rend ces scieurs incapable d´obtenir les permis d’exploitation nécessaires pour répondre aux conditions d’un nouveau accord forestier avec la Commission européenne.

L’Accord de Partenariat Volontaire (APV) exige que tous les produits issus de la forêt doivent être légaux et traçables d´ici 2013, mais selon un article occasionnel du CIFOR, le système  actuel de délivrance des permis pour abattre des arbres pour le marché intérieur n’incite guère les scieurs « informels » de respecter la loi. Au lieu de cela, les candidats sont découragés par des « tracasseries administratives » sans fin et des coûts élevés, laissant le secteur ouvert à la corruption.

« C’est un piège typique que nous avons trouvé dans tous les pays que nous avons évalué : le Cameroun, le Gabon, la République du Congo et la République Centrafricaine », a expliqué Paolo Cerutti, chercheur au CIFOR et co-auteur de The domestic market for small-scale chainsaw milling in the Republic of Congo (Le marché intérieur pour les sciages à la tronçonneuse à petite échelle dans la République du Congo). « D’un côté, on a une réelle demande pour ce bois par le marché intérieur … [tandis que] de l’autre côté, vous avez des fonctionnaires de l’État qui profitent du fait que les scieurs ne peuvent pas obtenir  les titres légaux d’exploitation forestière. »

Selon le rapport, les  en quête  des permis spéciaux doivent attendre plusieurs semaines avant que leur demande soit approuvée.. Les temps de réponse officiels sont rarement respectés et les coûts ont tendance à s’accumuler. Selon les résultats des recherches antérieures menées par Alain Noël Ampolo, l’autorisation d’abattre des arbres autour de la capitale Brazzaville coûte chaque scieur environ 400.000 francs CFA (807 USD), une somme que peu de personnes peuvent en avoir . Parmi ceux qui le peuvent, beaucoup finissent par tomber dans l’illégalité. Avec des allocations mensuelles d’abattage limitées à seulement cinq arbres à des fins commerciales, les scieurs utilisent souvent leurs permis plus longtemps qu’ils sont valides et dépassent leurs quotas.

Ce n´est donc pas surprenant que les scientifiques ont découvert que sur les 62 répondants, seulement deux (ou 3 pour cent) ont eu une sorte de permis d’exploitation au moment de l’enquête. Toutes les personnes interrogées étaient des tronçonneurs à petite échelle situés à proximité des villes de Pointe-Noire ou de Brazzaville.

Cela arrive à un moment où la demande urbaine en bois  augmente. En voyant une faille dans la chaîne d’approvisionnement, des bureaux régionaux du Ministère de l’Économie forestière ont mis en place des mesures d’adaptation qui ne sont pas totalement en accord avec la loi, selon l´article. Cela comprend la délivrance de permis officiels à couvrir des zones – où le bois est contrôlé par les bureaux régionaux – dans lesquelles les scieurs peuvent couper et traiter un certain nombre d’arbres.

« Certains fonctionnaires de l’État mettent en place une sorte de « contrat d´exploitation forestière » avec les bûcherons … [tandis que d’autres] profitent du fait que les tronçonneurs ne peuvent pas mettre la main sur des titres légaux d’exploitation forestière et demandent des pots-de-vin tout au long de la chaîne de production », a expliqué Mr Cerutti.

Néanmoins, des mouvements vers la professionnalisation de l’industrie sont déjà en cours. En vertu de l’APV, le Congo promet que d’ici l’année prochaine toute la production de bois en provenance des forêts sera suivie et légale, à la fois pour l’exportation et la consommation nationale. L’accord vise à améliorer la gouvernance environnementale et la durabilité de la gestion forestière.

Cette nécessité de renforcer les institutions propres à chaque pays afin de répondre aux nouveaux objectifs de développement durable est également abordée à la conférence Rio+20 de cet été. Au cours de cet événement de trois jours, les organisateurs espèrent aborder les enjeux relatifs à la cohérence et la coordination à plus grande échelle entre la gouvernance au niveau régional, national et local.

Bien que l’APV ait recueilli beaucoup de soutien, y compris du Ghana et du Cameroun qui ont fait des promesses similaires, les questions sur la capacité de l’accord de transformer l’économie informelle du bois domestique persistent. Ceci est particulièrement inquiétant étant donné que le marché a été largement ignoré durant la période préparatoire de la mise en œuvre de l’APV. Certains craignent que sans y mettre l’attention nécessaire, un tel changement radical pourrait avoir des effets négatifs non seulement sur la main-d’œuvre directe, estimée à environ 50.000 dans les pays évalués, mais aussi sur les économies rurales qui sont actuellement soutenues par cette main-d´œuvre.

« L´abattage à la tronçonneuse est une source très importante pour les économies locales, et par conséquent toute mise en œuvre de l’APV doit être extrêmement prudente [afin] de ne pas échanger les bénéfices actuelles avec un statut « légal » imposé à l´avenir qui pourrait anéantir ces derniers, soit en criminalisant les bûcherons ou en les envoyant à la faillite », a dit Guillaume Lescuyer, scientifique au CIRAD / CIFOR et co-auteur du rapport.

Afin d’assurer que Rio +20 offre un message global que les forêts importent pour le développement durable, le CIFOR coordonnera l’une des plus importantes conférences sur les forêts le 19 Juin 2012. Forests: The 8th Roundtable at Rio+20 discutera des nouveaux résultats de la recherche, des lacunes restantes dans les connaissances et des implications politiques pour l’intégration des forêts dans les solutions aux quatre défis clés afin de progresser vers une économie verte: l´énergie, la nourriture et le revenul´eau, et le climat. Les places sont limitées alors inscrivez-vous ici pour éviter d’être déçu!

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