« Les terres gérées par les populations autochtones dont les droits sont respectés présentent moins de déforestation, ainsi que plus de biodiversité et de stocks de carbone que les zones protégées par les pouvoirs publics », a affirmé Vicky Tauli-Corpuz, Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
En effet, les 350 millions d’autochtones qui vivent sur la planète assurent l’intendance d’un territoire qui recèle 80 % de la biodiversité mondiale et séquestre 300 milliards de tonnes de carbone – soit 33 fois le volume des émissions énergétiques mondiales en 2017.
« C’est en exigeant le respect des droits des populations autochtones qu’on évitera les conflits, qu’on fera progresser les objectifs de développement durable (ODD) et qu’on renforcera la conservation et la restauration des paysages : c’est une opportunité unique qui s’offre à nous », a redit V. Tauli-Corpuz.
De la peur à l’action
Ce sommet a démarré avec les voix des communautés autochtones qui nous interpellaient des forêts du bassin du Congo et de Papouasie-Nouvelle-Guinée, des jungles du Mexique et des îles du Pacifique Sud. D’autres avaient fait le déplacement depuis les steppes du Kenya ou les prairies russes, de la région caraïbe de la Colombie ou de l’Arctique canadien.
Ils relataient tous des situations similaires : accusations de crimes, poursuites et expulsion de leur territoire. Leur rôle d’intendants environnementaux de leurs terres qu’ils assument depuis longtemps est devenu en effet l’un des plus risqués du monde.
Geovaldis Gonzalez Imenez, porte-parole des paysans autochtones de la région colombienne de Montes de María, a dénoncé la pression des agro-industriels et des industries extractives, en déclarant que 135 meurtres ont eu lieu cette année dans cette zone.
« En République démocratique du Congo (RDC), plus de 1 million de personnes ont été expulsées de leurs terres ancestrales requalifiées en parcs nationaux, sans pouvoir bénéficier d’activités lucratives de remplacement comme l’écotourisme », a expliqué Diar Mochire Mwenge, qui dirige le Programme de développement des Pygmées en RDC.
« Les militants autochtones et locaux, notamment les femmes et les jeunes, sont les « héros du mouvement écologiste », a déclaré Jennifer Morris, présidente de Conservation International.
Pour autant, loin de s’appesantir sur la dure réalité, les participants se sont employés à formuler dans les grandes lignes des mesures pragmatiques devant aboutir à des paysages fonctionnels pour les populations et la planète, convaincus que « le pessimiste se plaint du vent, l’optimiste espère qu’il change, et le réaliste règle la voilure ». Exemple : mettre en avant l’importance d’une démarche fondée sur le respect des droits dans l’agenda du climat.
Nous devons « changer de refrain » et remplacer la peur et le catastrophisme par l’espoir et l’action, a fait savoir Hilary Tam, Directrice de la stratégie de l’agence londonienne Futerra, qui a imaginé comme pendant aux ODD un programme d’objectifs d’actions individuelles, baptisés les Good Life Goals (les bons objectifs de vie).
Sortir de sa zone de confort
« Pour gérer les paysages et faire face à la crise climatique par une approche fondée sur le respect des droits, il faut l’adhésion pleine et entière de tous les échelons de l’appareil politique, une véritable participation des membres des communautés, ainsi qu’un accès juste et équitable aux ressources », a exposé Cornelia Richter, vice-présidente du FIDA.
Johannes Refisch de l’ONU Environnement était du même avis en assurant qu’« il nous faut repenser le paradigme de développement imposé aux populations autochtones », et en faisant remarquer que les violations des droits ont souvent lieu ouvertement et en toute impunité. « Des mesures de protection des droits existent, encore faut-il les appliquer. »
Pour J. Morris de Conservation International, la réponse au problème du climat passe par des synergies entre un grand nombre d’acteurs, dont des groupes marginalisés sur les plans social, économique et politique. « Nous ne sommes pas si performants en termes de collaboration totale, parce que cela nous force à sortir de notre zone de confort et à mettre notre ego de côté », ajoute-t-elle.
Mais comme le confie la première femme PDG d’IBM : « J’ai appris à prendre en charge des tâches que je n’avais jamais effectuées auparavant, parce que la croissance et le confort ne peuvent pas coexister. » J. Morris est bien convaincue qu’il en va de même dans le domaine des paysages durables et de la lutte contre le changement climatique.
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