Conservation néolibérale : commoditisation, média et célébrité

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Avec l'expansion de l'industrie à un rythme rapide, telles que la carrière de pierre sur la photo (Pune Maharashtra, Inde) et un changement dans la façon dont nous valorisons l'environnement, comment les moyens d'existence locaux et de l'environnement seront-ils affectés? Photo gracieuseté de Oxfam Australie / flickr

BOGOR, Indonesia (23 May, 2011)_Est-il possible de “consommer le gâteau de conservation d’autrui et consommer le dessert du développement aussi ?’’ La nourriture intellectuelle, bien entendu.  Les intellectuels Jim Igoe et Dan Brockington, très connus pour leurs critiques extensives de la conservation contemporaine, se sont interrogés sur les bases de tels scénarios gagnants-gagnants et suggèrent que la croissante  “néolibéralisation” de la conservation conduit à la re-régulation de la nature par des formes croissantes de commoditisation.

Dans un article paru pour la première fois dans “Conservation and Society” en  2007 qui demeure l’un des journaux les plus lus et cités, Igoe et Brockington définissent la néolibéralisation comme “une restructuration de la société pour permettre l’expansion de marchés libres”.

Les personnes en faveur de la néolibéralisation affirment que cette approche va automatiquement bénéficier aux moyens d’existence locaux et à l’environnement. Toutefois, le résultat du placement de valeurs monétaires à la biodiversité, aux écosystèmes et à leurs biens et services, disent Igoe et Brockington, découle sur deux types de “gouvernance environnementale hybride”  dans lesquels les états, le secteur privé, les ONGs et les communautés partagent la responsabilité de l’action de conservation.

Finalement, selon eux, ceci conduit à une plus grande perte de revenus et de l’environnement car l’environnement est formaté par ces institutions hybrides qui s’en sont approprié. Bien que publié il ya quatre ans, le sujet continue de résonner alors que nous nous bataillons avec la complexité de valoriser les services écosystémiques et l’implémentation actuelle des payements équitables pour les services environnementaux (PSE)  et les initiatives de réduction des émissions dues à la déforestation et la dégradation des forêts (REDD).

Même si les auteurs admettent que “le terme néolibéralisme est en voie de devenir rien moins qu’un véhicule d’intellectuels qui aiment critiquer tout ce qu’ils n’aiment pas dans ce monde”, Igoe et Brockington apportent une perspective intéressante sur la pratique courante de conservation ; particulièrement pertinente car même des résultats apparemment intangibles pour la conservation et le développement continuent d’être poursuivis.

Dans des articles plus récents des deux auteurs relatifs à la conservation néolibérale, ces arguments sont élaborés plus avant. Dan Brockington dans son essai, “Environnementalismes Puissants: conservation, célébrité et capitalisme” fait une discussion éloquente et convaincante sur la déconnexion entre la vision de la nature par ceux dans les pays développés, comparée à ceux actuellement affectés par sa protection. Un intérêt particulier est la dissection de la croissance et le pouvoir des ONGs de conservation, “ environnementalismes conflictuels” et la l’association de l’image de la célébrité à la cause environnementale.

Brockington décrit deux types d’environnementalisme. Le premier représenté par les intérêts des personnes riches dans les pays développés qui financent le travail des grandes ONGs de conservation (ou BINGO’s). Il déclare que la croissance globale des aires protégées est motivée par la demande pour une nature immaculée qu’elles procurent. De tels environnements procurent la “ nature authentique et inviolée [que les gens] souhaitent consommer durant leurs vacances ”.

Le second environnementalisme que Brockington décrit est basé dans les services que de tels environnements donnent aux pauvres ruraux : la moisson d’aliments naturels, la collecte de bois énergie, le matériel de construction, etc. Il suggère que ces deux environnementalismes sont en conflit, comme prouvé par la création continue d’aires protégées, souvent conduite par l’agenda  des BINGO’s, qui pourrait conduire à des déplacements physiques et/ou économiques.

Brockington déclare que  “ l’éthique occidentale de la jungle, qui valorise les terres vierges et intouchées et influencée par les peuples n’est pas compatible avec les environnementalismes locaux”. Les relations de pouvoir inéquitables entre les environnementalismes locaux du Sud et les BINGO’s du Nord bien-financés résultent souvent à la marginalisation des premiers.

Il est tout aussi indéniable qu’il existe un fort parrainage des causes environnementales par les célébrités et Brockington astucieusement contextualise comment la croissance de l’implication de célébrités dans les causes de conservation fournit une connexion entre la nature et le monde urbain capitaliste. En bref, les personnes se sentent liées à la célébrité et ceci peut être utilisé pour  apporter la nature dans les salons des potentiels supporters de BINGOs. Que la représentation de la nature soit exacte ou non, les résultats sont indiscutablement effectifs, affirme Brockington.

Dans un essai subséquent, Jim Igoe pousse la réflexion plus loin. Il introduit son article par la déclaration selon laquelle “la conservation de la biodiversité, décrite traditionnellement comme un cheval de bataille contre les affections environnementales de l’expansion du capitalisme, est maintenant complètement impliquée dans sa reproduction”. Des alliances intimes entre les BINGOs et les bailleurs de fonds venant des entreprises soutient une grande part de cette transition. De tels partenariats mettent plus en relief la commodification de la nature à travers les  concepts comme le PSE et REDD.

L’acceptation du capitalisme par les BINGOs en particulier a été soutenue par une représentation médiatique de la nature, avec chaque fois des célébrités soutenant des causes nobles. Ainsi,  déclare Igoe, l’approche corporatiste qui consiste à utiliser le domaine des compagnies à but lucratifs adoptée par les organisations de conservation leur permet maintenant d’être capables de générer de substantiels financements.

Le développement de réseaux sociaux a surpassé l’absorption passive des informations des medias pour une interaction croissante où de potentiels donateurs individuels peuvent “joindre la communauté de conservation”. Par conséquent, de potentiels supporters sont influencés pour apporter un soutien financier aux interventions de conservation mais bases sur la “réalité” qui leur est présentée en usant des versions irréfutables et parfois  déformées de la réalité, affirme Igoe.

Brockington, et dans une moindre mesure, Igoe, se réfèrent au phénomène de la “célébrité conversationniste” qui a réalisé son niveau de gloire basé sur leur “stance et représentation de la nature”. Brockington affirme que le statut de célébrité de certains  conversationnistes représente un autre lien entre l’environnementalisme et les affaires avec un besoin concomitant d’autopromotion, d’apparences publiques et de récompenses financières; Eux-mêmes deviennent commodités. Les causes nobles du genre que les publics épousent sont inspirées par le siège du conversationniste qui vit religieusement dans le même monde par la connexion avec une version de la nature qu’ils voient dans les médias, guidés par un expert reconnu.

Ce court résumé ne donne pas justice à la complexité des arguments d’Igoe et Brockington et une lecture complète de leur travail serait vivement recommandée.

Translated by Edith Abilogo. Find the English version here.

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Igoe, J. et D. Brockington. 2007.  Conservation Néolibérale: Une Brève Introduction. Conservation and Society 5(4):432-449

http://www.conservationandsociety.org/temp/ConservatSoc54432-2243722_061357.pdf

Brockington, D. 2008. Environnementalismes Puissants: conservation, célébrité et capitalisme. Media, Culture and Society 30: 551-568

http://mcs.sagepub.com/content/30/4/551.full.pdf+html

Igoe, J. 2010. Le spectacle de la nature dans une communauté globale d’apparences: engagements avec les médiations spectaculaires de la conservation transnationale. Critic of Anthropology 30: 375-397

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