Des lois solides peuvent soutenir le développement durable en Afrique – avis d’expert

Les acquisitions de terres en Afrique sub-saharienne sont à la hausse et les tendances d'investissement changent, ce qui augmente la nécessité d'éliminer les échappatoires fiscales et d'améliorer les cadres juridiques, selon un scientifique de haut niveau en foresterie.
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Dans de nombreux cas, les investisseurs contournent la loi lorsqu’ils sont impliqués dans des acquisitions de terres à grande échelle en Afrique sub-saharienne, affirme Andrew Wardell, directeur de recherche du portefeuille Forêts et Gouvernance du Centre de Recherche Forestière Internationale. Photo: CIFOR/Ollivier Girard

VARSOVIE, Pologne (version originale: 4 décembre 2013) – Les acquisitions de terres en Afrique sub-saharienne sont en hausse et les tendances d’investissement changent, ce qui augmente la nécessité d’éliminer les échappatoires fiscales et d’améliorer les cadres juridiques, selon un scientifique de haut niveau en foresterie.

Historiquement, ces opérations ont été caractérisées par les investissements des pays développés de l’hémisphère Nord vers des pays en voie de développement de l’hémisphère sud. Néanmoins, elles impliquent de plus en plus les investissements d’une nation du sud vers une autre – en 2012 environ 1,9 billion de dollars d’investissements directs à l’étranger ont eu lieu parmi les économies émergentes, selon Andrew Wardell, directeur de recherche du portefeuille Forêts et Gouvernance du Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR).

«La recherche montre que ce ne sont pas seulement les pays BRIC – Brésil, Russie, Inde et Chine – qui se précipitent à acheter des terres, mais des pays tels que la Malaisie, l’Indonésie et Singapour achètent dans des pays tels que l’Ethiopie, le Libéria, le Nigéria, le Mozambique et le Gabon», déclare M. Wardell lors d’un événement en marge des négociations sur le climat des Nations Unies à Varsovie, en Pologne fin 2013. L’événement avait pour but de montrer comment un état de droit peut contribuer à une action juste et responsable face au changement climatique.

L’accent a peu été mis sur la réglementation de la qualité des investissements dans les secteurs de terres forestières et agricoles de la région; ce qui a mené des chercheurs du CIFOR, en collaboration avec l’Organisation Internationale de Droit du Développement (OIDD), à procéder à un examen systématique des lois-cadres, dit M. Wardell. L’OIDD, qui a co-parrainé l’événement parallèle avec la République démocratique du Congo, aide les gouvernements et la société civile à réformer des lois afin de promouvoir la paix, la justice, le développement durable et les opportunités économiques.

«Nous avons travaillé avec des étudiants en droit et le personnel des facultés de droit en Tanzanie, au Mozambique et en Zambie afin de procéder à un examen rigoureux et systématique des lois-cadres de base liées aux investissements, aux terres et aux secteurs de la foresterie, de l’énergie et de l’agriculture», déclare M. Wardell.

RÉSOLUTION DE PROBLÈMES

Les résultats préliminaires des recherches dans les trois pays confirment que, dans de nombreux cas, les investisseurs contournent la loi et négocient souvent avec ou par le biais des autorités traditionnelles, des hauts fonctionnaires, des parlementaires ou des entrepreneurs haut placés. Les investissements proviennent également de sources variées, y compris des banques, des fonds d’actions et de retraite, des compagnies, des sociétés d’exploitation forestière et des particuliers.

De nombreux pays de l’Afrique subsaharienne ont des lois d’investissement libérales et des incitations fiscales généreuses, mais les lois régissant les droits coutumiers d’utilisation des terres et de propriété sont faibles. M. Wardell dit que la recherche vise à identifier des pratiques légales et réglementaires innovantes, qui pourraient fournir des leçons à d’autres pays.

«Nous avons identifié un nombre assez important d’impacts sociaux et environnementaux qui sont souvent associés à ces investissements – souvent liés à la perte de l’accès à la terre», dit-il.

Dans les pays où des lois coutumières sont observées, il y a des acquisitions de terres à grande échelle – impliquant parfois des centaines de milliers d’hectares de terres – ayant été négociées directement avec des chefs, complètement en dehors des cadres juridiques réglementaires existants. Des lois contradictoires peuvent dissuader les initiatives à faible intensité de carbone.

Cependant, des changements très dynamiques surviennent concernant le droit, déclare Robert Kubugi, un professeur de droit au Centre d’études supérieures du droit de l’environnement et à l’École de droit de l’Université de Nairobi. Davantage de pays africains changent les constitutions, la gouvernance et les systèmes de l’administration publique, dit-il.

La République démocratique du Congo est un exemple remarquable.

Dans un pays où 60% de la superficie totale est couverte par la forêt, selon les statistiques de la Banque mondiale, le bois de feu et le charbon de bois restent les sources énergétiques dominantes pour les communautés rurales et urbaines, conduisant à une augmentation du taux de déforestation, explique M. Wardell.

Le pays a commencé à travailler en faveur de la protection de son environnement en mettant un accent renouvelé sur la gestion forestière, créant un nouveau code forestier en 2002, instituant des réformes fiscales de concessions forestières en 2004 et entreprenant un réexamen juridique en 2011.

Dans de nombreux cas, les investisseurs contournent la loi lorsqu’ils sont impliqués dans des acquisitions de terres à grande échelle, affirme M. Wardell. Il ajoute que des exemples montrent que la Zambie et la Tanzanie ont adopté des approches novatrices pour répondre à certaines de ces préoccupations.

La Zambie a mis en place un processus en deux étapes pour la délivrance de baux provisoires, qui sont assujettis au respect de certains critères de performance dans une période de temps déterminée. Les innovations de la Tanzanie comprennent une loi spécifique sur les terres villageoises, l’introduction d’un plafonnement sur la taille des baux et la durée pendant laquelle les baux sont valides.

RECHERCHER DES SOLUTIONS

Les résultats de recherche, qui seront publiés dans les rapports nationaux à venir et un article comparatif de revue, présenteront des pistes sur les enseignements à tirer, afin d’éviter de réinventer la roue dans chaque pays et chaque communauté, déclare Marie-Claire Cordonnier Segger, une experte juridique principale de l’OIDD, qui fournit également des conseils juridiques sur les traités internationaux sur le développement durable à l’Organisation des Nations Unies et à des gouvernements en Afrique, en Asie et dans les Amériques.

«Nous allons examiner les lois et les politiques qui aident à renforcer des activités en visant les personnes engagées dans l’éducation; des politiques qui tiennent compte de la façon de sensibiliser aux droits, à l’accès à l’information et à la participation du public. En outre, nous ciblons des politiques qui considèrent le recours pour les victimes d’impacts et comment les bénéfices peuvent être protégés et partagés; des règlementations qui tiennent compte des moyens de combiner les systèmes juridiques coutumiers et formels, les règles d’utilisation des terres sur le terrain – à la fois traditionnelles et formelles – et la façon dont elles travaillent ensemble», dit-elle.

Ce travail s’inscrit dans le cadre du Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie et est soutenu par le Département britannique pour le développement international (DFID).

Pour plus d’informations sur les sujets abordés dans cet article, veuillez contacter Andrew Wardell à a.wardell@cgiar.org

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