Bogor, Indonésie (août 2013) – Une étude à grande échelle* a trouvé qu’une poignée de grands arbres stocke jusqu’à la moitié de la biomasse aérienne dans les forêts tropicales, ce qui suscite des implications pour la gestion des forêts et l’atténuation du changement climatique.
Les arbres absorbent en grandissant le carbone de l’atmosphère, le stockent dans les feuilles, le tissus ligneux, les racines et la matière organique dans le sol. Ce faisant*, ils jouent un rôle essentiel dans la régulation du climat de la Terre et dans l’atténuation du changement climatique. Le calcul de la biomasse aérienne* – qui comprend toute la biomasse vivante ou la matière organique au-dessus du sol, y compris les tiges, les souches, les branches, l’écorce, les graines et le feuillage – aide les scientifiques à mesurer* le rôle des forêts comme puits de carbone dans l’atténuation du changement climatique.
L’étude a été menée par Ferry Slik, chercheur au Centre de Conservation Intégrative, au Jardin Botanique Tropical de Xishuangbanna et à l’Académie Chinoise des Sciences. M. Slik, qui a exploré auparavant la biomasse aérienne des forêts tropicales à des niveaux locaux et régionaux*, a voulu examiner ces questions à l’échelle mondiale. Après avoir parcouru la littérature pour trouver des scientifiques faisant des inventaires d’arbres, il les a invités à se joindre à son étude.
«La plupart du temps, ils ont réagi positivement», dit-il. «Ils ont perçu l’avantage de faire partie d’un projet à plus grande échelle.»
Finalement, environ 60 scientifiques ont été impliqués dans l’étude, qui a été publiée récemment dans Global Ecology and Biogeography*. Ils ont examiné des données sur 192 308 arbres, d’au moins 10 cm de diamètre, dans 120 vieilles forêts humides de basse altitude en Amérique du Sud, en Afrique et en Asie. Les grands arbres ont été définis comme ceux mesurant au moins 70 cm de diamètre à hauteur de poitrine (dhp).
Parmi leurs résultats, les chercheurs ont montré que les arbres de plus grande taille jouent un rôle plus important dans le stockage de la biomasse qu’on ne le pensait auparavant. «Seulement 3% des forêts sont composées de grands arbres, mais ces arbres stockent jusqu’à la moitié de la biomasse», affirme M. Slik. «Si seulement quelques-uns de ces grands arbres meurent, il y a immédiatement un impact majeur.»
Ils ont également conclu que les variables climatiques affectent la densité de grands arbres et la biomasse aérienne, ce qui signifie que le changement climatique affectera le stockage de la biomasse dans les forêts tropicales. «Si les températures continuent d’augmenter – une augmentation de 2 à 6 degrés (Celsius) est prévue au cours du prochain siècle – ceci aura probablement une incidence négative sur ces grands arbres», explique M. Slik.
Les résultats ont des implications dans plusieurs domaines. «Maintenant, nous savons que ces grands arbres sont importants pour la biomasse», dit M. Slik. «Cependant, nous ne savons pas encore beaucoup de la dynamique de ces arbres – à quelle vitesse ils grandissent, quel âge ils atteignent – parce que les chercheurs se sont concentrés sur des parcelles relativement petites, contenant peu de grands arbres en raison de leur faible densité.»
Avec les progrès dans les techniques de télédétection, il est relativement facile de reconnaître ces grands arbres et de faire des estimations précises de la biomasse, dit-il. Les chercheurs devraient commencer à se concentrer davantage sur les plus grands arbres dans des parcelles plus grandes, conseille-t-il. Depuis la publication de cette étude, M. Slik et ses collègues ont effectivement identifié plus de 3 000 parcelles couvrant 800 000 arbres et 20 000 espèces. Il ajoute que d’autres rapports de recherche seront à venir.
L’importance de ces grands arbres devrait également tirer la sonnette d’alarme pour l’industrie forestière. «L’exploitation forestière se concentre habituellement sur les grands arbres», dit M. Slik. «Peut-être est-il mieux de se concentrer sur les arbres de taille intermédiaire. L’exploitation forestière pourrait être gérée d’une manière plus respectueuse de l’environnement.»
«La plus grande menace pour ces grands arbres est l’intervention humaine dans les forêts», a-t-il ajouté. «Dès que les activités d’exploitation forestière ou agricole commencent, ces arbres sont généralement les premiers à disparaître. Il faut beaucoup de temps avant qu’ils reviennent.»
Pour plus d’informations sur les sujets abordés dans cet article, veuillez contacter Ferry Slik surferryslik@hotmail.com ou Terry Sunderland sur t.sunderland@cgiar.org
L’étude a été réalisée avec l’appui de l’Instituto Nacional de Pesquisas da Amazônia
(INPA), le Traitement Sylvicole pour la Régénération des Forêts Exploitées dans le Kalimantan Oriental (STREK), PlotNet Forest Database (Lopez-Gonzalez et al. 2010) et le Réseau d’Évaluation et de Surveillance de l’Écologie Tropicale (TEAM). De plus, de nombreux chercheurs ont partagé leurs données d’inventaire des arbres avec les auteurs.
*Liens non traduits en français
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