Un fonds mondial fournirait des moyens efficaces pour alimenter le programme climatique de REDD+

Les efforts pour mettre fin à l´augmentation des températures mondiales peuvent réussir si les décideurs politiques mettent en place une large structure de gouvernance pour superviser la REDD+, à partir de laquelle l'argent serait distribué à travers des fonds d´États aux projets locaux.
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REDD+ attribue une valeur financière au carbone stocké dans les arbres, créant un effet dissuasif pour l’abattage. CIFOR/Marco Simola

OSLO, Norvège (11 juin 2013) – Les efforts pour mettre fin à l’augmentation des températures mondiales peuvent réussir si les décideurs politiques mettent en place une large structure de gouvernance pour superviser la REDD+, à partir de laquelle l’argent serait distribué via des fonds d’états aux projets locaux, selon un nouveau document* de recherche.

La meilleure façon de mener la REDD+ – un programme soutenu par l’ONU pour réduire les émissions causées par le déboisement et la dégradation des forêts – fait l’objet de controverses politiques, en particulier en ce qui concerne le rôle que devraient jouer les marchés financiers et les gouvernements au sein du programme.

National Governance Structures for REDD+*” (Les structures nationales de gouvernance pour la REDD+), coécrit par les professeurs Arild Vatn et Paul Vedeld de l’Université norvégienne des Sciences de la Vie*, examine quatre structures nationales potentielles pour la REDD+ qui pourraient être financées directement par un marché réglementé ou un fonds mondial soutenu par des sources publiques et privées.

Les options présentées dans le document de recherche considèrent les forces et faiblesses de la captation du soutien économique mondial vers le niveau national. Ce soutien passe par des intermédiaires dirigés par le marché financier, un fonds national distinct, un fonds d’une administration nationale de l’État ou un appui budgétaire conditionnel qui dirigerait les ressources vers des projets locaux, des programmes nationaux ou des politiques sectorielles.

« L’idée principale est de changer d’optique et de commencer à réfléchir à des structures de gouvernance plus larges, plutôt que de le penser uniquement comme un marché, ce qui a été le mécanisme privilégié jusqu’à maintenant », a déclaré M. Vatn durant la conférence sur les « Options d´architectures nationales de REDD+ *» en Norvège.

« La façon dont est organisée le financement aura un impact décisif sur sa capacité à offrir des émissions de carbone réduites, des moyens d’existence locaux améliorés et une protection de la biodiversité. »

PRÉPARER LE TERRAIN

La REDD+ attribue une valeur financière au carbone stocké dans les arbres, créant un effet dissuasif pour les abattre. Si les décideurs politiques mettaient en place un fonds mondial, payé par les marchés du carbone, cela signifierait que les pays et les entreprises pourraient recevoir des paiements de crédits de carbone sous forme de Réductions d’Emissions Certifiées (REC), délivrées par un fonds, comme qu’alternative au marché international du carbone, selon M. Vatn.

Actuellement, les crédits de carbone sous forme de REC sont émis par le conseil exécutif du Mécanisme de Développement Propre (MDP), approuvé en vertu des règles du Protocole de Kyoto à la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique (CCNUCC), un traité international qui impose des obligations contraignantes aux pays industrialisés afin de réduire leurs émissions de gaz à effet (GES). Ils ouvrent la voie à des investissements dans des projets de réduction d’émissions dans des pays en voie de développement.

Jusqu’à présent, étant donné que la REDD+ est encore au stade préliminaire – dénommé la « phase de préparation » – la plupart du fonds de 17,2 milliards de dollars* promis aux projets de protection des forêts a été mise à la disposition des pays en voie de développement par le biais du Fonds de partenariat pour le carbone forestier* (FCPF) de la Banque mondiale et du Programme REDD des Nations Unies.

Les fonds sont destinés à créer des capacités et des stratégies nationales pour une REDD+ basée sur les causes de déforestation spécifiques à chaque pays.

Cependant, le programme, qui vise à établir une politique climatique mondiale, est confronté à de nombreux défis, selon M. Vatn.

« Au début des discussions, tout le monde pensait à développer des projets de mise en conformité, financés par les entreprises comme dans le cadre du MDP », a expliqué M. Vatn. « Alors que nous y voyons certains points forts, il existe également quelques faiblesses évidentes, nous devons donc réfléchir à des alternatives. »

RETOMBÉES DES OPTIONS DE FINANCEMENT

Les auteurs proposent une REDD+ qui serait basée sur un système semblable au MDP, en devenant en partie un système d’échange de carbone basé sur le marché et composé d’acheteurs sous forme d’entreprises ayant besoin de réduire leurs émissions et de vendeurs qui possèdent – ou ont le droit d’utiliser – des forêts tropicales.

« Étant donné qu’un accord post-Kyoto prévoit des réductions substantielles et accepte les échanges de permis d’émissions, le marché pourrait générer des revenus importants pour investir dans la protection des forêts – ce qui est considéré comme l’un des atouts d’une solution basée sur le marché », explique M. Vatn.

« Cependant, il existe beaucoup de problèmes avec le MDP, concernant des enjeux tels que l’additionnalité (la différence positive nette résultant des interventions de développement économiques) et la transparence. »

Un fonds international, convenu par les gouvernements, qui délivre des REC aux entreprises chargées de réduire les émissions, pourrait être au moins aussi efficace dans la collecte de l’argent, a-t-il dit. Il ajoute que le fonds pourrait également régler les problèmes rencontrés dans le cadre d’une solution fondée sur le marché, en augmentant la transparence et en incluant des mesures visant à réduire le potentiel de fraude.

D’un point de vue international, plusieurs alternatives pour une structure nationale de REDD+ pourraient prendre forme.

Une alternative serait de mettre en place un fonds national en dehors de l’administration de l’Etat, où les ressources découleraient d’un fonds mondial vers des fonds nationaux basés sur le niveau de réduction des émissions issues des forêts dans chaque pays.

Le fonds national pourrait être régi par un conseil d’administration indépendant fonctionnant comme un intermédiaire entre les propriétaires forestiers – ou les utilisateurs – et le fonds international. Le conseil pourrait inclure des représentants du secteur privé, de la société civile et des pouvoirs publics.

Une autre option consisterait en un fonds géré par l’administration de l’Etat. L’argent reçu serait affecté par un conseil désigné pour la REDD+, composé de membres du gouvernement, de la société civile et du secteur des affaires. Il fonctionnerait indépendamment du budget de l’Etat, mais aurait la capacité d’utiliser l’administration de l’Etat existante afin d’organiser des programmes et la coordination entre les différents secteurs de la société.

Bien que cette solution possède plusieurs des points forts du fonds indépendant, un avantage supplémentaire est la capacité d’utiliser des systèmes publics existants et le potentiel de faire en sorte que des secteurs aussi importants que l’agriculture et l’énergie soient également impliqués, selon M. Vatn.

La dernière option proposée par les auteurs est de canaliser l’argent d’un fonds mondial sous la forme d’un appui budgétaire conditionnel. Bien que cette solution utilise les systèmes administratifs existants – elle pourrait également offrir des ressources pour les rendre plus efficaces et elle devrait réduire davantage la transparence par rapport aux deux options de fonds nationaux proposées.

«Bien qu’étant principalement le meilleur système pour la responsabilité démocratique et potentiellement le meilleur pour la coordination intersectorielle, la situation actuelle concernant l’utilisation publique abusive de l’argent peut entraver sa fonctionnalité dans de nombreux pays», a déclaré M. Vatn, ajoutant qu’un fonds distinct au sein de l’administration actuelle de l’état semble pouvoir offrir la meilleure solution dans de nombreux contextes.

« Ce qui ressort, ce sont les nombreux défis auxquels l’organisation de la REDD + au niveau national devra faire face », concluent les auteurs, ajoutant que leur analyse de toutes les options indique que l’option la plus faible est le système basé sur le marché.

RENFORCER LA TRANSPARENCE

Le principal attrait d’un tel système a été sa capacité à attirer des fonds privés, mais ceci soulève également la question de savoir si les négociations internationales sur les terres forestières appartenant aux gouvernements sont appropriées. Dans le cas d’un système fondé sur le marché, la transparence peut être réduite parce que les commerçants peuvent demander que l’information soit protégée pour des raisons commerciales, selon le document.*

L’analyse a montré qu’il semble difficile d’établir un système de lutte contre la déforestation et la dégradation des forêts qui soit séparé de la prise de décision de l’Etat et des organes administratifs, ce qui conduit les auteurs à suggérer que la prise en compte des conditions locales est d’une importance primordiale lors du choix d’une option réalisable.

« Nous avons encore besoin de définir qui sont les acheteurs de carbone, qui sont les vendeurs et de définir les relations entre eux », a dit M. Vatn. Il ajoute que tout les quatre modèles de financement sont ouverts à la corruption vu que la REDD+ livre de grandes quantités d’argent aux pays en voie de développement, ce qui pourrait attirer des organisations et des personnes qui sont avides de l’argent, plutôt que de soutenir les idéaux de la REDD+.

« Evidemment, les enjeux de gouvernance et de comportement de recherche de rente – caractérisés par la poursuite de l’argent – ne sont pas seulement importants quand il s’agit de la réelle mise en place d’un système REDD+. Ces facteurs sont actifs dans la plupart des pays riches en ressources forestières et peuvent entraver n’importe quel type de changements politiques majeurs si les acteurs de la bureaucratie de l’Etat et les entreprises bénéficient de la situation ‘business-as-usual’ », a déclaré Maria Brockhaus, économiste et analyste des politiques forestières et des sciences agricoles au Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR).

Pour plus d’informations sur les enjeux abordés dans cet article, veuillez contacter Maria Brockhaus à m.brockhaus@cgiar.org

Cette recherche s’inscrit dans le cadre de l’Étude Comparative Mondiale sur la REDD+, qui fait partie du Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie. Elle est soutenue par l’Agence Norvégienne de Coopération pour le Développement, AusAid, le Ministère Britannique du Développement International et la Commission européenne.

* Liens non traduits en français

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