BOGOR, Indonésie (20 août 2012) _ Encourager les femmes à occuper des postes de direction doit devenir une priorité nationale pour les décideurs politiques d’Ouganda afin de freiner la déforestation galopante, incite un nouveau rapport du Centre de Recherche Forestière Internationale.
« Nous devons essayer d’élargir le rôle des femmes dans la vie publique vu qu’elles sont largement exclues des prises de décision en Ouganda. Cela a des conséquences graves pour les forêts », déclare Abwoli Yabezi Banana de l’Université de Makerere et auteur principal de Gender, Tenure and Community forests in Uganda*.
Des recherches antérieures du CIFOR* ont montré que des groupes mixtes de femmes et d’hommes conduisent à une meilleure gestion des forêts. Et l’amélioration du rôle des femmes afin de parvenir à une gestion durable des forêts est urgente en particulier en Ouganda, qui a le taux de déforestation le plus élevé en Afrique de l’Est. Le pays a perdu plus d’un tiers de ses forêts depuis 1990.
« Les efforts nationaux pour augmenter le statut des femmes doivent couvrir tous les segments de la société, y compris avoir plus de femmes qui assument activement les rôles de décideurs politiques, de pouvoirs publics et d’organismes privés, et les postes de direction au sein des gouvernements locaux aux niveaux des village, des districts et des régions. »
M. Banana dit qu’il aimerait voir les droits des femmes améliorés grâce à la mise à disposition de subventions à petite échelle pour les femmes impliquées dans les affaires de la foresterie (des plantations d’arbres à la transformation des produits forestiers), de formations et de bourses d’études accordées à des scientifiques forestiers femmes, et aussi grâce à l’intensification du débat public sur le genre et la gestion des ressources naturelles pour sensibiliser les politiciens et les professionnels.
L’objectif du nouveau rapport CIFOR était de jeter de la lumière sur la participation des femmes dans la foresterie communautaire en vue d’identifier les moyens pour améliorer leurs droits et accès aux forêts.
Nous devons essayer d’élargir le rôle des femmes dans la vie publique puisqu’elles sont largement exclues des prises de décision en Ouganda.
En inspectant des organisations gouvernementales et non gouvernementales dans les districts de Mpigi, Masaka et Rakai dans la zone agro-écologique du lac Victoria, M.Banana et ses collègues ont constaté que seulement cinq pour cent des postes de direction technique et politique ont été occupés par des femmes.
Et les quelques femmes qui occupent ces postes d’influence ont eu peu d’impact sur l’élévation du niveau de vie et les besoins des femmes rurales qui vivent près des forêts, les utilisent et les gèrent.
Au niveau universitaire, moins de femmes s’inscrivent aux disciplines scientifiques telles que la foresterie. En outre, alors que la loi prévoit une certaine proportion de femmes dans les postes électifs, les femmes se présentent à peine pour prendre ces positions.
Un autre problème est que les dirigeants et les professionnels (hommes comme femmes), qui sont nés, élevés et formés dans les centres urbains, ne se comprennent pas facilement les besoins des groupes marginalisés vivant dans les zones rurales. Ils ont donc du mal à répondre aux besoins de développement des groupes ruraux marginalisés de manière adéquate.
C’est encore plus difficile pour les jeunes filles, qui sont souvent négligées due à la préférence pour les garçons quand il s’agit de possibilités d’éducation. Ceci peut seulement être rectifié si les établissements d’enseignement dans les zones rurales s’améliorent et deviennent davantage inclusive.
Et, selon M. Banana, l’accès à l’éducation dans les zones rurales se détériore en Ouganda.
« Il est plus difficile pour les groupes marginalisés des zones rurales forestières d’obtenir une bonne éducation et d’accéder à des postes de direction, que ce l’a n’était il y a une ou deux décennies auparavant », dit-il.
L’étude a également montré que la qualité et l’étendue de la participation des femmes à la prise de décision dans la gestion des forêts sont améliorées quand les femmes adhèrent à des groupes officiels d’usagers de la forêt.
Mais malgré les efforts pour inclure le genre dans les activités des projets, moins d’un tiers des organisations étudiées ont obtenu du succès dans l’intégration du genre. Ceci est cohérent avec les tendances mondiales: l’ONU* pour l’alimentation et l’agriculture a récemment constaté que seulement 10% de l’aide totale à l’agriculture, la sylviculture et la pêche va aux femmes, les organisations donatrices échouant à « mettre en place toute l’organisation des systèmes et des ressources nécessaires pour faire du genre ‘l’affaire de tous’ », a déclaré un rapport de la Banque africaine de développement.
La lente amélioration du statut des femmes dans le monde* a été mise en évidence par Christiana Figueres, secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques lors du récent sommet Rio +20.
« Je perds franchement ma patience », dit-elle.
« Nous avons mis au point la littérature. Nous avons mis au point les discours. Nous avons perfectionné les points de discussion. Ce n’est plus de cela qu’il s’agit maintenant. Sauf si nous avons réellement un effet sur le terrain, nous ne faisons rien. »
Les organisations qui font appel aux priorités des femmes auront des impacts positifs sur la réduction de la déforestation par des effets directs et indirects, dit Monsieur Banana.
Les programmes de plantation d’arbres devraient par exemple s’assurer que la fourniture de semis d’espèces d’arbres répond aux besoins et intérêts des femmes (bois de chauffage, sécurité alimentaire et nutritionnelle, amélioration de la fertilité des sols et conservation de l’eau). Cela aidera à assurer la pleine participation des femmes dans les programmes forestiers.
« Doté d’une meilleure information et de finances, les femmes pourraient être dans une meilleure position pour participer efficacement à la gestion des ressources forestières dans le pays », concluent les auteurs.
Edité par Robin McDowell.
Cette nouvelle publication fait partie du programme de recherche du CIFOR sur les forêts et les moyens d’existence et a été soutenue par l’Agence autrichienne de développement.
* liens non traduits en français
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