TURRIALBA, Costa Rica (9 décembre 2013) – Bien que des paysages ruraux puissent être gérés de manière à optimiser à la fois l’atténuation et l’adaptation au changement climatique, de nombreux projets de développement axés sur le climat ne parviennent pas à tirer profit de leurs bénéfices combinés, selon Bruno Locatelli, chercheur au Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR) et au Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD).
Avec une planification appliquée, les paysages peuvent être gérés de manière à renforcer les synergies entre l’adaptation et l’atténuation, tout en équilibrant les compromis, a-t-il déclaré lors d’une conférence au Centre de Recherche sur l’Agriculture Tropicale et de l’Éducation supérieure (Centro Agronómico Tropical de Investigación y Enseñanza, CATIE) au Costa Rica en octobre.
«Il existe un fort potentiel d’intégration de l’adaptation et l’atténuation dans les 235 projets que nous avons examinés à l’échelle mondiale. Toutefois, les documents de projets ne mentionnent pas souvent les raisons de les intégrer», a expliqué M. Locatelli aux participants de la septième Conférence scientifique interaméricaine Henry A. Wallace, qui marquait le 40ème anniversaire de la fondation CATIE.
L’atténuation – qui consiste à réduire ou à compenser les émissions de gaz à effet de serre – et l’adaptation – qui désigne les ajustements visant à réduire l’impact du changement climatique – sont souvent cataloguées séparément, dit-il. Pourtant, les paysages ruraux contribuent à l’adaptation et à l’atténuation en absorbant et en stockant du carbone, tout en tempérant les effets du changement climatique et en permettant aux agriculteurs de diversifier leurs moyens de subsistance. Les projets de développement ruraux axés sur l’adaptation pourraient facilement intégrer des stratégies d’atténuation, dit M. Locatelli.
Par exemple, un projet visant à aider les agriculteurs à accroître leur résilience au changement climatique et à diversifier leurs revenus pourrait inclure la restauration des bassins versants pour les protéger contre les inondations. De plus, les arbres plantés pour une telle restauration auraient l’avantage d’atténuer les gaz à effet de serre par le stockage du carbone. Une stratégie d’atténuation s’ajouterait ainsi au projet d’adaptation.Mais l’adaptation et l’atténuation ne s’harmonisent pas toujours parfaitement, selon M. Locatelli.
Si ces arbres sont dans une plantation, il pourrait y avoir des conséquences non voulues. Par exemple, une diminution de la disponibilité en eau, une augmentation du ruissellement pendant les orages ou l’utilisation de produits agricoles chimiques pourraient présenter des risques pour les personnes en aval.
Bien que la conservation d’une forêt puisse permettre à une collectivité locale de recevoir une compensation pour la réduction du déboisement dans le cadre du programme REDD+ (Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts) soutenu par l’ONU, elle pourrait également induire des restrictions qui limiteraient l’accès des populations aux produits forestiers. Ceux-ci sont importants pour leurs moyens de subsistance et pour faire face aux variations climatiques, dit M. Locatelli.
«Il est nécessaire de prendre en compte à la fois les synergies et les compromis», dit-il. Le manque de données réelles pour guider la conception des projets et les décisions politiques complique les choses. Lorsque M. Locatelli a examiné 139 documents sur l’adaptation et l’atténuation du changement climatique, il a constaté que 64 mentionnent des raisons pour intégrer l’atténuation et l’adaptation dans les projets, mais seulement 11 documents ont réellement étudié les projets existants sur le changement climatique.
Cela signifie que de nombreux projets sont probablement conçus et entamés sans s’appuyer sur des preuves scientifiques suffisantes, dit-il. Certaines de ces lacunes de connaissances pourraient être comblées si les dirigeants de projet disposaient de systèmes communs pour collecter des données sur le terrain qui pourraient ensuite être partagées, dit-il.
Plusieurs mesures ont déjà été prises en ce sens. Les Normes Climat, Communauté et Biodiversité «identifient les projets qui luttent simultanément contre le changement climatique, soutiennent les communautés locales et préservent la biodiversité», selon l’organisme.
Les communautés locales militent particulièrement pour bénéficier de la combinaison des mesures d’adaptation et d’atténuation, dit M. Locatelli.
«Si vous ajoutez des mesures d’adaptation aux projets de REDD+, vous pouvez traiter les questions d’équité, accroître la participation des parties prenantes et rendre le projet plus acceptable pour les communautés locales. La combinaison de l’adaptation et de l’atténuation aborde la durabilité de manière plus holistique.»
Pour plus d’informations sur les sujets abordés dans cet article, veuillez contacter b.locatelli@cgiar.org.
Ce travail s’inscrit dans le cadre du Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie et est soutenu par le partenariat de recherche CIFOR-REDD+ AusAid.
Les mesures d’atténuation et d’adaptation étaient à l’ordre du jour lors des négociations de l’ONU sur le climat à Varsovie. Les bénéfices potentiels de la combinaison des stratégies d’adaptation et d’atténuation ont également été abordées lors du Forum mondial sur les Paysages du 16 au 17 novembre, qui coïncidait avec le sommet de l’ONU sur le climat.
Cet article a été publié dans sa version originale le 13 novembre.
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