Cet article fait partie d’une série sur les paysages. Retrouvez la première partie: Pourquoi les paysages sont-ils importants?
Mon précédent questionnement, «pourquoi», était tout sauf rhétorique – toutes les personnes avec lesquelles j’en ai discuté s’accordent à dire que les paysages sont extrêmement importants, et qu’ils sont essentiels pour le bien-être humain au sens large, de même que pour la vie sur notre planète.
Demander «Que sont les paysages?» est plus délicat, et requiert une certaine réflexion quant à l’objectif que nous visons avec les approches paysagères. La manière dont nous utilisons «paysage» doit être déterminée par le contexte que nous souhaitons et la solutions que nous visons, et pas l’inverse.
Le mot paysage a été utilisé depuis des centaines d’années pour désigner des aspects artistiques, juridiques et géographiques. Je ne cite pas souvent Wikipédia, mais j’ai trouvé cet article sur les «paysages» éclairant, en particulier son étymologie avec de nombreuses références aux paysages comme construction sociale. Je remarque aussi un article de Kenneth Olwig qui explore le concept historique en profondeur, y compris en disant qu’«un concept de fond tel que le paysage est davantage lié à la loi et la justice sociale qu’à la loi naturelle ou l’esthétisme».
Le concept d’approches paysagères pour le développement durable est présent depuis des décennies. Cet article récent du PNAS signé Jeff Sayer, Terry Sunderland et al. constitue une revue intéressante et souligne aussi que la Convention sur la diversité biologique de l’ONU, un processus intergouvernemental, a récemment inclus le concept de paysage dans son processus de négociation.
Donc, où en sommes nous avec le concept de paysage maintenant, à la lumière de toutes ces expériences passées?
Arriver à une définition
Après avoir travaillé des années sur des définitions forestières, je suis bien conscient que différentes opinions, positions, affiliations professionnelles, agendas politiques et sentiments peuvent tourner à la dispute autour d’une définition, telle que celle du mot «forêt».
Je ne souhaite pas avoir le même débat autour de la définition de «paysage». Ce dont nous avons besoin, c’est d’une compréhension générique et suffisamment large pour inclure toutes les combinaisons de foresterie, d’agriculture et d’autres utilisations terrestres. Et nous avons besoin d’une définition qui englobe les intérêts et les actions humaines, de même que la constitution biophysique du paysage. En d’autres termes, en définissant un paysage, nous devons inclure à la fois l’étendue et les ressources du paysage et les interactions de la société avec le paysage.
L’objectif d’une approche paysagère, tel que nous l’avons exprimé dans les objectifs du Forum mondial des paysages, est de contribuer au développement durable et de soutenir des actions pour ralentir le changement climatique. Voilà un défi de taille.
Nous devons donc définir «paysage» de manière à n’exclure aucune situation dans le monde réel. Nous devons aussi, de préférence, définir «paysage» afin qu’il soit utilisé à différentes échelles. Une exploitation agricole est un paysage. La terre est le paysage ultime. Le concept doit s’appliquer à l’ensemble de cette série d’échelles si nous voulons atteindre les objectifs décrits ci-dessus.
Mais nous ne pouvons pas décrire un paysage uniquement en localisant une zone géographique et en dessinant une frontière sur une carte. C’est la dimension humaine qui en fait un paysage. Donc il faut qu’une sorte d’institution(s), exprimant les ambitions d’une zone géographique, fixe les priorités et aide à transformer ces ambitions en actions. Nous pouvons appeler cela la gouvernance des paysages, et nous devrions reconnaître que de tels accords de gouvernance peuvent être radicalement différents et exister sous forme d’accords totalement informels ou strictement formels.
Avec ces deux paramètres de base – étendue géographique et gouvernance – je propose la définition suivante:
Paysage = «Lieu avec une gouvernance en place»
(1) Lieu: un paysage est une zone géographique qui peut être de toute taille – de très petit à très large.
(2) avec une gouvernance en place: il existe une (des) institution(s) qui va considérer des options pour le paysage et fixer les priorités. Le niveau de formalisation de gouvernance peut varier, d’informel à formel.
Le graphique ci-dessus illustre comment différents types de paysages peuvent être représentés avec ces deux dimensions. Comme vous pouvez le voir, il s’agit d’une manière très inclusive de définir ce qu’est un paysage. En fait, c’est tellement inclusif qu’un emplacement donné fera toujours partie de différents paysages, à différentes échelles, au même moment. Cela ne pause aucun problème et reflète aussi les différentes couches de gouvernances simultanées dans lesquelles nous nous trouvons.
Cette discussion autour de ce que signifie le terme paysage constitue un point de départ pour les prochaines étapes, et le sujet de mon prochain blog. Je discuterai comment nous pouvons déterminer des objectifs et mesurer les progrès des paysages de manière comparable au-delà de toutes ces situations.
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