La nouvelle approche pour déterminer les niveaux d’émissions de référence est une première étape cruciale pour la REDD +

Les scientifiques du Centre de Recherche Forestière internationale ont développé une méthode innovante qui permet aux pays de commencer à établir les Niveaux d'Emissions de Référence de gaz à effet de serre – afin d'estimer la quantité de carbone stockée dans leurs forêts et le niveau des réductions d'émissions qu'ils peuvent réaliser en les protégeant.
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Pasi Haapakorva

Les scientifiques du Centre de Recherche Forestière internationale ont développé une méthode innovante qui permet aux pays de commencer à établir les Niveaux d’Emissions de Référence de gaz à effet de serre – afin d’estimer la quantité de carbone stockée dans leurs forêts et le niveau des réductions d’émissions qu’ils peuvent réaliser en les protégeant.

Dans une nouvelle publication du CIFOR, Analysing REDD+: Challenges and Choices (Analyse de la REDD +: défis et choix), lancée cette semaine en marge du sommet Rio +20, le chercheur du CIFOR Louis Verchot et son équipe ont exposé l’approche « par étapes » à la mesure des Niveaux d’Emissions de Référence (RELs).

Verchot affirme que le développement des RELs est une première étape cruciale pour le fonctionnement de la REDD +, qui est un programme soutenu par l’ONU visant à réduire les émissions mondiales de carbone en payant les pays tropicaux pour ralentir la déforestation.

« Les Niveaux d’Emissions de Référence sont le point de référence à partir duquel on commence à compter combien de réductions d’émissions on a pu réaliser. Les RELs mesurent les situations contrefactuelles, en indiquant combien les émissions auraient été en absence d’activités de REDD + pour réduire les émissions », dit-il.

Il ajoute que les RELs sont la clé à la fois pour mesurer à quel point les projets REDD + ont été efficace – et aussi pour calculer combien devrait être payé à ceux qui réduisent les émissions.

Mais, dit-il, décider exactement sur ce que ces niveaux devraient être n’est pas facile.

« C’est un peu compliqué à mettre en place parce que c’est basé sur le contrefactuel, c’est quelque chose qui ne s’est pas fait. »

« Il y a un côté technique, détecter combien de déforestation a eu lieu dans le passé, quels ont été les causes et facteurs clés de la déforestation, et des attentes raisonnables sur les principaux facteurs ou causes de déforestation dans le futur. »

« Est-ce qu’on s’attend à ce que les prix des produits agricoles augmentent? Est-ce qu’on s’attend à ce que les exploitations minières soient développées? Est-ce qu’on s’attend à ce que l’huile de palme se développe, ou à ce que les prix stagnent et l’expansion des plantations se ralentisse? »

Ce sujet sera l’un des thèmes discutés lors de la conférence de deux jours La gestion durable des forêts d’Afrique centrale: hier, aujourd’hui et demain à Yaoundé au Cameroun les 22 et 23 mai 2013. .

Retrouvez les reportages du CIFOR sur les forêts d’Afrique Centrale sur forestsnews.cifor.org/fr/yaounde

Il dit qu’il y a une certaine quantité de prédictions de l’avenir impliquées.

« Dans des circonstances normales, sans beaucoup de variation dans l’économie, on peut certainement s’attendre à ce que les cinq dernières années soient un bon prédicateur pour les cinq années à venir. Prédire les écarts par rapport aux tendances passées est presque impossible. Personne ne s’attendait par exemple à la crise financière. »

« Si une crise financière a lieu et les rendements des terres diminuent, on s’attendrait à une forte diminution de la conversion de zones boisées. Si une flambée des prix a lieu, si les prix pour la nourriture augmentent, on s’attendrait à ce que les terres agricoles se développent. »

« Et par conséquent, la prédiction de certains de ces points critiques est très difficile et c’est là que les approches de modélisation ont tendance à échouer. »

En plus de ces considérations techniques dans la mesure des RELs, il y a une dimension politique, dit-il.

« Parce qu’il y a des pays ou des groupes qui financent la REDD et des pays ou des groupes qui reçoivent de l’argent pour la réduction des émissions, les deux parties doivent se mettre d’accord sur la ligne de base et les mesures de performance. À la suite de ces accords, les pays devront entreprendre une série d’activités visant à réduire les émissions contre un retour financier attendu pour leurs efforts. C’est donc là que la négociation entre en jeu. »

Un des problèmes majeurs avec la mesure des niveaux de référence est le fait que de nombreux pays forestiers tropicaux n’ont pas la capacité institutionnelle et les ressources pour la collecte de données afin d’estimer avec précision leurs stocks de carbone forestiers et facteurs de déforestation.

Toutefois, la nouvelle méthode « par étape » mise au point par l’équipe du CIFOR et adopté lors des négociations de la CCNUCC à Durban en 2011, offre un moyen de résoudre ce problème.

L’approche permet aux pays de commencer à mesurer leurs RELs maintenant, en utilisant des données de déforestation que tout le monde peut accéder.

Celles-ci ne sont pas aussi précises ou exactes que des données spécifiques au pays qui prennent en compte les types de forêts et les circonstances nationales, dit Verchot, mais l’approche progressive par étapes offre des voies par lesquelles un pays peut avancer à des estimations plus complexes et moins incertaines au fur et à mesure que les données s’améliorent.

« Nous avons mis au point une méthode indiquant comment passer d’informations basiques à l’obtention d’informations plus complètes, afin d’obtenir des meilleures estimations, des estimations plus précises et ayant moins de biais. Chaque ‘étape’ énumère un certain nombre d’améliorations qui pourraient être réalisées pendant que les pays mettent en place un programme REDD +. »

« Nous avons établi comment les différents niveaux de collecte de ces types de données – les données de déforestation, les données de teneur en carbone, les données de densité de carbone –  seraient effectivement changés en passant d’une phase de préparation à une phase de démonstration d’activité, lorsqu’on atteint la compensation à grande échelle pour la réduction des émissions. »

« C’est axé sur les solutions, cela indique voici comment commencer, et voici quelques-unes des prochaines étapes à réaliser pour améliorer les estimations. Donc, dans la mesure où les pays le jugent utile et dans la mesure où cela permet à chacun d’entrer au début du processus, je pense que c’est quelque chose de positif.

Ce qui manque encore, selon Verchot, est l’incitation pour les pays à faire la transition au-delà de la première étape.

« La motivation va venir quand l’argent sera sur la table, et c’est une des choses qui manquent en ce moment dans les négociations, et c’est l’une des raisons pour lesquelles les pays n’avancent pas si vite à ce sujet. »

« En ce moment, tout est en phase de préparation, il n’y a aucune certitude à long terme du financement de la REDD +, et c’est l’un des aspects, montrés par notre recherche, qui est un obstacle majeur à la REDD + pour aller de l’avant », dit-il

Mais jusque-là, ajoute Verchot, l’établissement des niveaux de référence en utilisant cette méthode peut placer les pays au moins une étape plus proche de la REDD +.

« Maintenant, un pays peut adresser un autre pays et dire: ‘Nous pensons que nos niveaux d’émissions sont ceci, et qu’ils vont être cela pour les cinq prochaines années. Donc, parlons du type de compensation que nous pouvons obtenir, et nous pouvons parler du genre de réductions d’émissions pour lequel nous sommes prêts à nous engager’. »

« Donc, ça pose la référence à partir de laquelle les négociations internationales peuvent avoir lieu, du côté des finances et du côté des réductions d’émissions. »

« C’est la première étape. »

Pour plus d’informations sur les questions discutées dans cet article, veuillez contacter Louis Verchot sur l.verchot@cgiar.org

Ce travail s’inscrit dans le cadre Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie*, aidé par the UK Department of International Development (DFID), The Norwegian Agency for Development Cooperation (NORAD) et AusAid. 

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